Sir Karell décède dans des circonstances mystérieuses. Son corps a été vidé de son sang, et subsiste sur sa gorge une étrange marque, qui s’apparente à une morsure. Il n’en faut pas plus pour que les habitants du village y voient la marque d’un vampire. Un an plus tard, alors qu’Irena Karell est sur le point de se marier, son fiancé est attaqué devant le château où son père a été trouvé mort. Et quelques jours plus tard, c’est elle qui subit l’attaque d’une femme étrange, sortie de la brume. La police, incrédule à l’idée d’une explication surnaturelle, fait appel au professeur Zelin, un grand spécialiste de l’occulte, tout particulièrement des vampires.
Mark of the Vampire est un remake de London After Midnight, un des premiers films de Tod Browning, avec Lon Chaney. C’est donc la seule possibilité (hormis un montage sans intérêt de photos du film original sur la piste son, qui seule a été sauvegardée) d’approcher ce qu’a pu être le film mythique dont on espère encore voir ressurgir une bobine un jour ou l’autre. De fait, on sait (du moins pour les cinéphiles) qu’il s’agit d’une supercherie. Mais cette dernière a plusieurs visages, et même en connaissant pour partie la teneur du récit, il peut encore y avoir des surprises pour le spectateur.
Certes, le scénario est quelque peu tiré par les cheveux, mais l’ambiance que pose Browning est à la mesure de ses autres films. Sans compter la présence au casting de quelques valeurs sûres, Lionel Barrymore, tout d’abord, mais également Bela Lugosi et Carol Borland (qui a également joué aux côtés de l’acteur hongrois dans Dracula, dans sa version théâtrale) B, ces deux derniers ne prononçant quasi aucun mot à l’écran, ne faisant qu’incarner la part vampirique du film, et distillant le doute… autant dans l’esprit de certains protagonistes que dans celui du spectateur. Visuellement, il a également de très beaux moments. La première scène du cimetière, centrée autour d’une vieille femme qui collecte des herbes autour des tombes est un vrai petit bijou, mais l’ensemble de celles qui font la part belle à Mora père et fils ne le sont pas moins.
En ce qui concerne le thème du vampire, les deux spécialistes qui se prononcent successivement pour cette hypothèse vont concentrer les connaissances qui seront transmises au spectateur à ce sujet. Le docteur Doskill identifiera le premier l’attaque d’un vampire, se basant sur la morsure que porte au cou Sir Karell autant que sur l’absence de sang dans le cadavre. Bien évidemment, il est aussi influencé par les légendes locales, notamment celles qui ont trait au château. C’est également lui le premier qui conseillera de protéger les entrées de la maison avec des branches d’épineux pipistrelle. Le professeur Zelin, éminent spécialiste de la question, confirmera tous ces éléments tout en en conduisant les recherches visant à tuer les vampires responsables… du moins en apparence. Il suggérera également à Irena de se protéger en portant un crucifix autour du cou. Sont également pointés les associations entre différentes espèces d’animaux (rats, araignées) et les vampires, sans même mentionner le fait qu’ils sont en mesure de se transformer en chauve-souris, et d’hypnotiser leurs proies.
Mark of the Vampire, malgré un scénario quelque peu tiré par les cheveux, est un bon exemple de vrai-faux vampire, genre qui aura eu son petit succès à la suite de la déferlante que représenta le Dracula de Browning, qui utilise ici pour la troisième fois les codes du genre (après London After Midnight et Dracula, donc). Un film qui vaut encore pour le jeu marqué du duo de vampires (la dernière scène du film, où ils parlent pour la première fois, est un vrai bonheur pour les amateurs du genre, et un pied de nez de Lugosi à son incarnation passée – 1931 – de Dracula), et par le travail effectué sur les scènes les plus gothiques.