Quatre vampires vivent en colocation à New York, dans le quartier de Staten Island. Il y a là Nandor, dit l’Implacable, un vampire de plus de 700 ans. Il se considère comme le chef de la petite communauté et est flanqué de Guillermo, son familier, à qui il a promis de le transformer un vampire. Nadja, une vampire d’origine roumaine, est la deuxième créature de la nuit qui vit sous le même toit. Elle est mariée à Laszlo, un ancien aristocrate anglais qu’elle a transformé il y a plusieurs siècles. Colin Robinson est le dernier membre du petit groupe. Alors que ses trois colocataires sont des vampires nocturnes, Colin est un vampire psychique qui est en mesure de se déplacer aussi bien le jour que la nuit. Il absorbe l’énergie vitale de ses victimes en les assommant par ses discours, où en s’abreuvant de la détresse de ceux qui sont à proximité de lui. Si les trois autres ont beaucoup de mal à le supporter, c’est son salaire qui permet à tout ce petit monde de payer le loyer à la fin du mois. La cohabitation est parfois difficile, mais l’irruption du Baron Afanas, un très vieux vampire bien décidé à les voir régner sur le territoire américain, ne va pas arranger les choses.
J’avais été moyennement convaincu par le film What we do in the Shadows, co-réalisé par Jermaine Clement et Taika Waititi en 2014. Comédies et vampires font rarement bon ménage, et l’humour potache du film m’avait paru manquer de fond. Surtout en comparaison à des détournements humoristiques plus grinçants comme le Vampires de Vincent Lannoo. Pour autant, la série ayant suscité de nombreux retours positifs (mais bon, le film aussi), il m’a semblé incontournable d’y jeter un oeil. 10 épisodes de 20 minutes, qui plus est, c’est finalement un ensemble assez rapide à parcourir.
À la différence du film, j’ai rapidement accroché à cette adaptation (après tout, le principe de départ est identique, même si les protagonistes sont différents). L’humour fonctionne mieux sur le format court, qui offre des respirations que le film ne pouvait pas se permettre. À l’image de ce dernier, on est pour autant bien sur une approche comique : la maladresse des protagonistes, leur décalage vis-à-vis du monde moderne, leur indolence, tout concourt à faire rire le spectateur. Mais il y a aussi des jeux beaucoup plus nombreux (et parfois subtils) avec la figure du vampire et ses différentes acceptions. Au final, difficile de nier la progression de l’histoire, notamment autour du personnage de Guillermo, familier de Nandor qui se languit d’être enfin transformé en vampire… et va découvrir qu’un chasseur de vampire se cache dans ses gènes.
Difficile de résumer en un paragraphe tous les jeux autour de la figure du vampire auxquels se livrent les scénaristes et réalisateurs. Chacun des protagonistes plonge ses racines dans les poncifs du genre. On peut ainsi imaginer Dracula derrière Nandor, Carmilla derrière Nadja et Ruthwen derrière Laszlo. Colin Robinson, le vampire psychique, permet également aux créateurs de la série de jouer avec une des approches délaissées dans le film de 2014. Les différences entre Nandor, Laszlo, Nadja et lui sont un des points centraux de cette première saison. Car si eux ont des pouvoirs surnaturels, et sont capables d’hypnotiser leurs victimes, de se transformer en chauve-souris ou de voler, lui en est réduit à se déplacer avec ses pieds. Mais il n’éprouve pas leur aversion à la lumière du soleil et aux artefacts religieux (tels que l’eau bénite). La série montrera bien que les rayons lumineux sont un danger pour les vampires traditionnels, qui peuvent devenir cendres s’ils y sont exposés trop longtemps. De même, les pieux sont présentés comme une arme incontournable. Les relations entre buveurs de sang et loups-garous ne sont pas en reste, un épisode opposant les quatre vampires avec une meute locale.
Mais ses jeux avec le mythe vont au-delà des caractéristiques des vampires. La première saison ne néglige pas de faire des ponts avec d’autres fictions sur le sujet, notamment Only Lovers Left Alive, Blade, True Blood ou Dracula. Tilda Swinton, Wesley Snipes et Evan Rachel Wood intègrent ainsi le conseil des vampires, dans lequel on retrouvera les trois vampires du film d’origine. La fête qui se tiendra dans la maison où vivent Nandor, Laszlo et Nadja verra également d’autres créatures faire leur apparition, dont un Jiang-Shi.
Une série relativement réussie, qui parvient à s’emparer de la figure du vampire et de ses différentes approches pour la tourner en dérision. Le film ne m’avais pas laissé un souvenir impérissable, mais cette réinvention sous l’angle d’épisodes courts (pour une saison toute aussi courte) force le respect.