Doïna Radescu est une adolescente comme les autres, qui s’apprête à passer le bac. La jeune femme appartient en réalité à une famille qui vit terrée depuis des années. Sa mère, son frère et sa sœur ainés craignent en effet le soleil et ont besoin de se nourrir régulièrement de sang. Doïna et Andrea, son deuxième frère, suivent depuis des années un traitement, imaginé par leur père disparu, qui fait d’eux des humains normaux. Mais bientôt, sur les conseils d’Andréa, la jeune femme décide d’arrêter de prendre ses médicaments. Dans le même temps, des problèmes poussent le reste de la fratrie à reprendre contact avec la communauté des vampires, avec laquelle il ont fait sécession il y a plusieurs années de ça.
Vampires succède donc à Marianne, premier projet estampillé fantastique/horreur 100% français produit par la chaîne Netflix. Après le thème de la possession, c’est celui des vampires que la plateforme choisit d’exploiter, en s’inspirant d’un roman inachevé de Thierry Jonquet. Si le livre avait été mentionné très tôt dans les premières annonces, ceux qui le connaissent risquent néanmoins d’être déçu. Les noms des personnages et certains éléments de scénario (la recherche d’une solution au vampirisme par la médecine) sont bien repris, mais le duo de scénariste a choisi de s’affranchir de l’essentiel du texte, et de partir dans une direction qui leur est propre. Après tout, pourquoi pas ?
L’un des points notables du roman était la figure du père, véritable pivot entre les différents protagoniste. Dans la série, c’est la mère qui est le lien entre les groupes de personnage, et s’impose comme la première figure de femme de l’histoire. Et si on dénombre plusieurs personnages masculins de premier plan (Andrea, Naser, Rad, Ladislas), ils s’effacent devant les personnages féminins. La Doyenne de la communauté ira même jusqu’à le souligner dans le dernier épisode : «Les hommes ne sont rien ». Il y a donc la volonté manifeste de mettre le pouvoir dans les mains des femmes (la chef de famille, la doyenne, l’hybride aux pouvoirs uniques), les hommes étant davantage des moyens ou des intermédiaires. Ils semblent en tout cas plus fragiles et beaucoup moins indépendants. C’est sans doute l’un des aspects les plus intéressants de là série, et là où les créateurs tirent leur épingle du jeu.
Par son ancrage dans le monde des quartiers populaires de Paris et son héroïne adolescente, Vampires se pare d’un ton à la fois très français et Young-Adult. L’image de la protagoniste à la découverte de sa différence et à la recherche de sa place dans la société est un des poncifs du genre, et les différents épisodes évoluent autour de cette idée. Pour Doïna, cette quête va de pair avec la découverte de ses sentiments. La dualité entre sa part vampire et sa part humaine se retrouve ainsi dans sa double attirance pour Naser (l’humain) et Ladislas (le vampire). Cette partie-là de Vampires peut parfois agacer, tant elle peut donner l’impression de « cocher les cases », d’autant que cette dimension du récit prend dans certains épisodes une place notable. Reste que les acteurs sont dans la grande majorité convaincants, et que la romance finit par se diluer dans le récit cadre, qui se focalise sur les relations entre les Radescu et le reste de leur communauté, notamment les Nemeth. De fait, les a priori des premiers épisodes finissent par céder.
Esthétiquement, la série ne manque pas de qualités. Les auteurs ont évité la surenchère d’effets spéciaux, ce qui a tendance à renforcer un peu plus leur approche « médicale » du vampire. Les jeux sur la lumière et les couleurs renforce les oppositions (principalement entre humains et vampires, mais aussi entre la famille de Doïna et le reste de leur communauté). De même, l’idée que le sang agit comme une drogue (tout particulièrement s’il s’agit de sang prélevé à la source) est plutôt bien mis en scène, autant par un jeu sur la netteté de l’image que par les mouvements de caméras.
Pour ce qui est des vampires, on découvre rapidement que ces derniers craignent la lumière du soleil (ce qui fera l’objet de plusieurs scènes d’importances), et ne peuvent se passer de sang. Pour autant, ils se contentent pour la plupart de sang d’animaux, le sang humain étant considéré comme tabou (et ses effets s’approchent de ceux d’une drogue). On apprend progressivement le fonctionnement de la communauté des vampires, avec à leur tête une doyenne, qui vivent dissimulés mais dans le même temps sans privations (l’appartement de Csillah Nemeth en est un bon exemple). Ce qui s’oppose à la vie de paria choisie par Martha Radescu pour les siens, condamnés à se terrer. La série nous dévoile progressivement que le vampirisme est une mutation, qui prolonge la vie et a fait évoluer les besoins de ceux qui ont été touchés. A ce titre, Andre et Doïna, enfants d’une vampire et d’un humain, sont à part. Si le premier n’a aucune caractéristique transmis par sa mère, et est donc totalement humain – Doïna s’avère être une hybride, qui s’affranchit de certaines limitations (en premier lieu la photophobie), et dont le sang a des capacités de régénération hors du commun.
Je n’avais pas du tout été convaincu par la bande-annonce, et savoir qu’il s’agissait d’une adaptation du Vampires de Jonquet n’a rien arrangé (je dois avouer que la bande-annonce m’avait fait sauter au plafond). Pourtant, en finissant le dernier épisode, je dois avouer que mon avis est bien différent. Si la série donne parfois l’impression de flirter avec les poncifs du genre (notamment en ce qui concerne la romance et la partie adolescente), la manière dont est présenté la société des vampires ne manque pas d’intérêt. Le final laissant en suspens plusieurs questions en suspens, il reste a espérer que le programme soit renouvelé par Netflix.
J’avais beaucoup d’à priori après avoir vu la bande-annonce et puis la série fut une véritable bonne surprise, d’autant que je n’ai pas du tout accroché à Marianne. J’ai aimé l’histoire, l’absence de surenchère et le bon dosage entre le kitsch vampirique (ce côté baroque qui me déplaît rarement) et la modernité due à l’environnement choisi. Les acteurs étaient effectivement convaincants et ce n’était pas gagné, Marianne m’a été pénible entre autres à cause du mauvais jeu des acteurs et actrices. Bref, une chouette série française que je recommande à qui s’intéresse de près ou de loin au sujet.