Bien qu’elle ne soit jamais allée dans l’espace, Greta Hill est une ingénieure en aérospatiale et une pilote hautement qualifiée. Depuis la mort de son mari lors d’un vol au cours duquel elle lui avait demandé de prendre sa place, sa vie va à vau-l’eau. Sa fille, soldate démobilisée, s’est reconvertie en tueuse à gages pour financer son addiction aux drogues dures. Son beau-père lui a également tourné le dos. Un jour, elle est contactée par une étrange jeune femme qui se présente comme un envoyé du Shrouded College. On propose à la mère de sauver la fille de ses dépendances si toutes deux et son beau-père acceptent une mission un peu particulière.
A Tales of the Shrouded College est une saga en plusieurs récits centrés autour d’une mystérieuse organisation qui agit dans l’ombre depuis des siècles. Chaque nouvel arc se veut une histoire horrifique avec un parti pris bien à elle, cette deuxième histoire imaginant une tentative d’évasion d’une petite bande de vampires prisonniers dans l’espace. Le titre en dit long sur l’ambiance, et l’influence des Douze Salopards (A Dirty Dozen en VO) sur la trame. Reste qu’au lieu de mettre en scène un groupe de repris de justice, le scénariste opte pour une famille dysfonctionnelle.
On comprend au fil des opus que le Shrouded College, qui est à l’initiative du recrutement des Hill, est seulement l’une des factions surnaturelles qui vivent dans l’ombre sur terre. Ce n’est ainsi pas eux qui ont emprisonné les vampires à l’origine, mais les Artisans, une autre organisation. Greta, Glory et George ne découvriront que très tard l’objet réel de leur mission, et le marché qui va être proposé — par leur intermédiaire — aux vampires. Car si ces derniers sont bloqués dans une cathédrale de verre en orbite autour du soleil, ils n’ont pas été détruits, compte tenu du potentiel offensif qu’ils représentent. Alors qu’un conflit se profile entre les différentes factions surnaturelles qui co-existent sur terre, le College veut engager un pacte avec les vampires, et les rallier ainsi à leur cause.
Le dessin d’Alberto Jiménez Alburquerque est une des forces de la série. Son trait s’empare à merveille de l’ambiance en huis clos du récit. Les scènes d’action sont efficaces, le coup de crayon homogène d’un bout à l’autre de l’histoire. Visuellement, il y a de très bonnes idées (la prison en forme de croix, notamment). La mise en couleur lumineuse ne gâche rien à l’ensemble.
Si les deux premiers numéros se focalisent sur le recrutement et l’entraînement des Hill, les tomes suivants se concentrent sur le cœur de l’action. Le récit est pensé comme une série B efficace, avec son lot de rebondissement et ses personnages à la psychologie affirmés. Qu’il s’agisse de Greta, de George ou de Glory, les Hill sont en effet un trio de têtes brûlées particulièrement efficace. Mais dans le même temps, leur relation est grevée par les ressentiments qu’ils éprouvent les uns pour les autres. C’est notamment le cas pour le lien qui unit Greta à sa fille Glory. Entre elles, la mort de leur mari et père. Lequel était également le fils de George, ce qui explique sans doute que celui-ci ne porte pas Greta dans son cœur.
L’histoire met en scène des vampires relativement classiques, qui craignent la lumière du soleil. C’est d’ailleurs en les emprisonnant à proximité de l’astre lumineux que les Artisans ont temporairement réglé le problème qu’ils représentaient. Dans le même temps, ils peuvent être blessés par de l’eau bénite, et tenus à distance par l’argent. L’une des originalités de Bloody Dozen A Tale Of The Shrouded College réside néanmoins dans les différents niveaux de vampirisation. Ainsi un individu mordu se transforme un drone, un vampire sans conscience soumis aux ordres de celui qui l’a vidé de son sang. Mais si ce dernier lui fait boire son propre sang, le drone devient un vampire en pleine possession de ses moyens.
Cette minisérie est au final un récit très dynamique et graphiquement efficace. Très influencée par des films comme Alien ou Les Douze Salopards, l’ensemble met au centre de la trame une famille dysfonctionnelle aux capacités complémentaires.