Un petit groupe de malfrats sans liens les uns avec les autres est sollicité par le mystérieux Lambert pour un enlèvement. Quand ils se retrouvent face à leur cible, c’est pour se rendre compte qu’il s’agit d’une jeune fille de douze ans. La manœuvre réussit, et le commando se replie dans un manoir isolé. Là, leur commanditaire les informe qu’ils vont devoir assurer la protection de l’adolescente, le temps pour lui de collecter l’argent de la rançon. Rapidement, les kidnappeurs comprennent que c’est la fille d’un des parrains du crime organisé qu’ils ont enlevé. L’endroit où ils la conservent se transforme vite en prison, et les criminels en garde-manger pour la créature avec laquelle ils sont enfermés.
En avril 2023, il est annoncé que Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett développent un remake dont le titre de travail serait Dracula’s Daughter, référence évidente au long-métrage de 1936. Le projet s’inscrit dans la lignée de L’Homme Invisible (2020) et de Renfield (2023) : Universal a laissé de côté son ambition de construire un univers partagé, suite à l’échec de La Momie (2017). Le titre devient Abigail durant la phase de postproduction, et tout lien avec Dracula est supprimé du montage final.
De fait, le film ne conserve rien du métrage de 1936, hormis l’idée d’une vampire née d’un vampire. La lutte de la comtesse Marya Zaleska contre la malédiction familiale, ses penchants saphiques disparaissent intégralement. Et si on voit bien le père d’Abigail dans les dernières images, rien ne dit qu’il s’agit de Dracula. Ce qui est ici mis en scène a davantage trait à la porosité entre le bien et le mal, voire au jeu des apparences. Chacun des personnages humains, au centre du film, est présenté comme un antihéros. Jusqu’à ce qu’Abigail elle-même ne fasse voler en éclat leur anonymat. Chacun témoigne d’une forme de corruption : le pouvoir, l’argent, la drogue… Face à eux, Abigail est certes une créature surnaturelle qui s’abreuve telle une bête sauvage sur ses victimes, mais est-elle nécessairement plus mauvaise ?
Le long-métrage de Matt Bettinelli-Olpin est avant tout un popcorn movie, qui ne rechigne pas à distiller quelques touches d’humour. Une fois tous les protagonistes rassemblés dans la vieille demeure, la trame se mue en un survival, où les chasseurs deviennent les proies (et inversement). Même si certains rôles frôlent le cliché (le boxeur), voire que les éléments de pathos peinent à convaincre (le fils de Joey), l’ensemble est efficace et les partis pris esthétiques intéressants. À l’image de cette enfant vampire qui se déplace comme une ballerine, tel un contrepied supplémentaire entre monstruosité et beauté.
À partir du moment où Abigail révèle à ses kidnappeurs ce qu’elle est, le mot vampire s’invite dans le film. Le personnage est malgré tout plus proche des buveurs de sang d’un 30 jours de nuit que des vampires de la Universal, avec sa bouche constellée de dents acérées. On comprend bien qu’elle se nourrit de ses victimes : elle conserve un charnier dans le cœur de la demeure. Mais elle ne semble pas vouloir faire dans la dentelle : elle leur arrache la peau du cou, voire la tête pour leur ponctionner du sang. Des habituelles armes contre les vampires, seuls la lumière du soleil et les pieux paraissent réellement efficaces. On verra qu’un humain mordu finit par se transformer en vampire, mais il n’est dans cet état qu’une marionnette de la volonté de son créateur. Il faut que ce dernier lui fasse boire son sang pour donner à sa proie une forme d’indépendance. Au rang des pouvoirs mis en scène, on note surtout une force physique décuplée, la maîtrise du vol, et des capacités de cicatrisation importantes.
Initialement vendu comme un remake de La Fille de Dracula, Abigail est au final un mélange entre film d’action et fantastique. Plutôt bien rythmé, avec quelques idées intéressantes, le métrage n’apporte pour autant rien de vraiment neuf.