Bonjour. Pouvez-vous vous présenter pour les internautes de Vampirisme.com ?
Je m’appelle Vanessa Callico, j’ai vingt-quatre ans et je suis écrivain et musicienne professionnelle. Je joue de la flûte traversière et du piano, je chante de l’opéra et j’enseigne en conservatoire. Je suis également soliste de musique de chambre au sein du trio Arpeggione. Ma mère Diana Callico est née en 1959 dans le sud du Chili. Après avoir fui son pays natal suite au coup d’état de Pinochet, elle a trouvé refuge au Vénézuela, avant de rejoindre la France où elle a travaillé comme ingénieur pour une entreprise pétrolière internationale. La Croisade des Carpates est le premier roman que nous écrivons.
Comment en êtes-vous arrivées à travailler ensemble ? Qu’est-ce qui a provoqué le déclic ?
Nous étions en voyage toutes les deux en Turquie à Istanbul et sortions tout juste de la basilique Sainte Sophie de Constantinople. En femmes qui se respectent nous bavardions sans discontinuer, et dans le hasard de la conversation j’ai mentionné le sultan Mehmed II qui s’était emparé de cette église. Celui-ci avait voulu envahir l’Europe avant de se heurter à la résistance sanglante du Drakul. Lorsque j’ai mentionné le mur de prisonniers empalés que le prince Draculea avait fait ériger tout le long de la frontière valaque pour décourager l’ennemi, ma mère a fait remarquer que toute cette histoire ferait un bon livre… et petit à petit la structure générale du roman a pris forme.
En ce qui concerne la répartition du travail, l’élaboration de l’intrigue se fait à deux cerveaux via des discussions interminables et souvent très animées ! Nos meilleures idées sont souvent venues de la confrontation permanente de nos deux imaginaires. Ensuite, pour des raisons de cohésion de style, c’est moi qui me charge intégralement de l’écriture à proprement parler, ma mère en étant la première critique et lectrice.
Être à deux nous permet peut-être d’avoir un regard plus détaché (et on espère plus juste!) sur le résultat que s’il n’y avait qu’un seul écrivain. Personnellement, quand je suis en train d’écrire, j’oscille en permanence entre « c’est géniaaal » et « c’est nuuul… (pleurs) ». S’il n’y avait pas eu les encouragements et les idées extraordinaires de ma mère, le livre n’aurait certainement pas abouti, en tout cas pas sous cette forme.
Vous avez choisi de présenter Drakul sous sa forme humaine et guerrière sans aborder le fameux mythe du vampire. Réservez-vous sa forme vampirique pour plus tard ?
Si l’on élargit le mythe de la figure vampirique, de nombreux personnages de la Croisade des Carpates peuvent déjà être considérés des vampires. L’esprit d’Éva, tout d’abord, va « vampiriser » le corps de la Princesse Ilona de Macédoine lors du mariage de celle-ci avec le Drakul. Cette capacité à changer d’époque et de corps à chaque mort détruit l’âme originelle des « hôtes » et confère à la Messagère de l’Apocalypse une certaine forme d’immortalité. Ce pouvoir de destruction et la vie éternelle qui en découlent rappellent certains traits du vampire. C’est également le cas des « Atlantes » qui passent du XVème siècle à des corps de notre époque par le biais du suicide, notamment le prêtre Niccolai de Modrussa qui devra subir une affreuse métamorphose. La figure historique du Drakul s’approche de sa forme vampirique tout d’abord par la monstruosité de ses actes.
Malheureusement, on n’a pas besoin de canines acérées pour faire le Mal, les humains se débrouillent très bien avec leur dentition d’omnivores. Au fil des tomes, Éva va partir chercher les Cavaliers de l’Apocalypse dans des époques troublées où finalement ces acteurs de l’Histoire sont au paroxysme de la violence, souvent plus par cause du contexte que par goût du sang ( même s’il est évident qu’ils ont des prédispositions particulières). Participer à l’Apocalypse offre finalement à tous ces personnages fascinants d’ambivalence une voie vers la rédemption. Après tout, beaucoup de vampires ( et d’humains) ne recherchent-ils pas secrètement cela ? Enfin, l’aspect sensuel du Drakul fleure bon le vampire. Éva ( et nous auteurs) est à la fois révulsée et fascinée par la férocité intègre du voïvode de Valachie. Cette attraction morbide pour cet homme violent qui défend son pays avec fureur est aussi dangereux que de tomber amoureuse d’un élégant amateur de sang frais…
Apparemment cette série est riche en histoire, avez-vous réalisé un gros travail de documentation pour arriver à ce résultat ?
On a bien envie de plagier et de répondre « tout est vrai, sauf ce qui est faux »! Certes, les scorpions avec des pinces de la taille d’un poney, ce n’est pas vraiment de la réalité historique. (J’espère.) Mais tout le contexte historique et géopolitique de la région est absolument réel et a nécessité de nombreuses heures d’investigations pour compiler tout ce que l’époque recensait de plus sanglant, de plus drôle et de plus épique ! Le livre en intégralité est parti d’une anecdote historique, c’est dire si l’inspiration est basée sur de faits réels. C’est d’ailleurs la plus riche des influences de la Croisade des Carpates, parallèlement avec les écrits sur l’Apocalypse de la Bible. Une partie non négligeable des paroles et actes du Drakul est directement extraite de l’Histoire.
Combien de tomes comportera la série et quelle sera la prochaine étape du voyage pour Eva ?
La saga s’intitulant les sept portes de l’Apocalypse, Éva a encore du pain sur la planche ! Plus sérieusement, nous rêverions de la faire voyager à travers le Temps pour quelques étapes riches en écrits mythologiques sur la fin du monde et en figures historiques controversées : Égypte, Scandinavie, Asie, mais également la révolution russe et la première guerre mondiale…
De plus, parallèlement à la quête de la Messagère, les conséquences divines vont de plus en plus se faire sentir sur la Terre de notre temps, donnant au personnage de Niccolai de Modrussa une occasion de s’affirmer et de faire briller son obscurantisme éclairé!
Dans le deuxième volume, il va décider de partir en quête du Graal dans le plus profond du métro New-Yorkais désaffecté depuis la Vague, avant de se retrouver à espionner un bunker de laboratoire pharmaceutique dégénéré au cœur de l’Alaska : plein d’action et de souffrances en perspective ! Quand Éva ouvre les yeux sur sa nouvelle mission, elle se retrouve prêtresse aztèque sous le règne de Moctezuma. Mais au même moment, les espagnols dirigés par Cortés mettent le cap vers le Mexique : quel sera son rôle lors des horreurs de la Conquista ? Reverra t-elle Vlad ?
Quelles sont vos premières et dernières rencontres avec un vampire (littéraire et / ou cinématographique) ?
On ne peut pas à proprement parler de rencontre, mais d’un véritable choc esthétique et émotionnel : celui du Dracula de Coppola. Quand on a douze ans et qu’on regarde pour la première fois ce monument de la culture vampirique, on ne peut pas rester indifférent. Et quelle musique ! Pour ma part, je me suis ruée sur l’œuvre de Bram Stoker et toute la famille a suivi le mouvement vers les romans vampiriques d’Anne Rice (nous sommes tous des lecteurs pathologiques de science fiction, fantasy, fantastique). Mais déjà à l’époque j’avais été interpellée par le personnage historique : durant tout le livre/film, le Dracula qui pourchasse Mina est hanté par son passé. Or, celui-ci est tout juste effleuré dans le livre, un peu plus mis en avant dans le film, lié à la romance avec la femme qu’il va perdre et ne jamais cesser de chercher. (Encore une similitude avec le Vlad de notre livre). Sinon, ma mère et co-auteur vient de finir Le livre Perdu des Sortilèges de Deborah Harkness et me le recommande vivement, je vais donc bientôt m’y mettre !
La Croisade des Carpates est un hommage au Dracula vampire. On y apprend les raisons de la légende noire de Vlad Tepes, pourquoi on l’appelle Dracula et non Draculea ( une erreur de frappe sur un tract diffamatoire de ses ennemis les bourgeois Saxons), on y découvre aussi sa souffrance et sa modernité. En effet, il a été l’un des premiers à fortement nuancer les privilèges de la noblesse, la remplaçant par une méritocratie plus égalitaire. Il protégeait le brigand idéaliste Skanderbeg et Jan Jiskra, un réformateur Hussite poursuivi par l’Église, qui finalement le trahira. Et s’il s’est fait attaquer par
l’Empire Ottoman, c’est également parce qu’il refusait de voir partir chaque année un tribut humain de cinq cent jeunes hommes de Valachie, condamnés à devenir janissaires ou esclaves eunuques. Il a été le seul à défendre les frontières de l’Europe contre l’envahisseur Ottoman, sans alliés et sans aucune reconnaissance.
Connaître le passé de Dracula vampire, nous trouvons cela capital pour mieux pouvoir apprécier la richesse du symbole qu’il est devenu.
Pour vous, comment peut-on analyser le mythe du vampire? Qu’est-ce qui en fait la pérennité ?
Qui n’a jamais rêvé d’être éternel ? De plus, la fascination pour le danger et le pouvoir de destruction est très puissante, aujourd’hui, comme hier ou demain. C’est cela, la séduction immortelle du vampire.
Avez-vous encore des projets de livres sur ce même thème ? Quelle va être votre actualité dans les semaines et les mois à venir ?
Nous revenons tout juste du festival des Imaginales à Épinal. La sortie de la suite de la Croisade des Carpates est prévue pour 2014, il faut donc finir ce deuxième volume dans les temps ! Parallèlement, je serai ce weekend au festival des Féeries du Bocage à Voulx. Nous serons également en signature au Festival de la forêt des livres le dimanche 25 août, puis aux Halliennales le 12 octobre 2013, dont la thématique est le Temps. Nous serons certainement également présentes dans d’autres festivals, nous mettrons les informations au fur et à mesure sur la page facebook de La Croisade des Carpates :
www.facebook.com/LaCroisadeDesCarpates
Vous y êtes les bienvenus, je me charge de répondre à toutes les questions et remarques que vous voudrez bien poser sur cette page. N’hésitez surtout pas à nous y transmettre vos impressions et commentaires sur La Croisade, cela nous fait énormément plaisir d’avoir des avis et d’échanger avec nos lecteurs !
Drakulament vôtres, Vanessa et Diana Callico