Philippe Charlier est un anatomo-pathologiste et paléopathologiste français qui se sera fait connaître ces dernières années pour plusieurs enquêtes autour de restes humains, comme la tête de Henri IV ou encore les restes de Richard Cœur de Lion. En partenariat avec Arte, il est également présentateur de l’émission Enquête d’Ailleurs, dans laquelle il part sur les traces des grands mythes et rites de l’humanité. Il fallait bien, à un moment ou un autre, que sa route mène le présentateur-scientifique sur les traces des vampires, c’est désormais chose faite avec ce numéro de la première saison de l’émission, qui le voit voyager dans la Roumanie de Dracula aux côtés d’Ana-Maria Lazar, roumaine et spécialiste des pratiques funéraires locales. Une alliée de choix pour découvrir les dessous des mythes et pratiques locales, et arpenter les sentiers parcourus par le voiévode Vlad Tepes.
Depuis les ruines de la cours à Bucarest (la fameuse Curtea Veche), jusqu’à Bran et son château attrape-touriste, Philippe Charlier et son acolyte du jour arpentent la Roumanie (et plus particulièrement la Transylvanie), parcourant l’histoire du voiévode Vlad Tepes et mettant en exergue certaines pratiques locales vis à vis de la mort (aussi bien pour ce qui a trait aux pratiques destinées à empêcher les morts de revenir, que du culte voué par les Roumains aux reliques des victimes du communisme, entreposées au monastère d’Aiud). L’anthropologue fera également étape à Snagov (ce qui permettra de faire découvrir la splendide chapelle où on dit que Vlad Tepes fut enterré), ou encore à Curtea de Argeș, l’un des berceaux de la Roumanie.
Si on regrette forcément le format très court de cette série documentaire, qui ne permet pas de proposer au spectateur quelque chose de très approfondi, on peut malgré tout saluer certains points qui sont ici abordés, à commencer par le rappel des origines de la réputation sanguinaire de Vlad Tepes (des pamphlets initiés par ses ennemis politiques), ainsi que le rappel des techniques de décapitation turque, qui scalpaient le visage et le cuir chevelu mais ne séparaient pas la tête du reste du corps. Un élément qui expliquerait pourquoi le squelette retrouvé dans les années 1930 à Snagov conservait son crâne malgré la présence d’un voile sur le visage.
Si j’ai été surpris du passage à Bran (le lien entre le voiévode et le château n’ayant jamais été prouvé), j’avoue avoir été agréablement surpris de la dénouement du documentaire, qui permet à Anna-Maria de rappeler que la fiction littéraire vampirique avait déjà cours dans son pays au moment où Bram Stoker publiait Dracula. Et de citer le cas emblématique du poème « Les Strigoï », écrit par Eminescu en 1876, soit 20 ans avant le roman irlandais.