Susan et son mari convolent en juste noce, et arrivent à l’hôtel où ils ont réservé une chambre pour la nuit. Mais la jeune femme a d’horribles visions à la première minute où son mari la laisse seule. Ils décident donc de passer leur première nuit dans le manoir familial de l’époux. Au fil des semaines, la jeune épouse va développer d’étranges visions, durant lesquelles une femme inconnue vêtue en mariée l’incite à commettre de sanglantes exactions. Une femme qu’elle reconnaît bientôt dans le visage de celle que son mari vient de sauver, sur la plage.
Si les adaptations de Dracula sont sans nul doute les plus nombreuses, Carmilla a également eu droit à de nombreuses variations cinématographiques (notamment lorsqu’il s’agit d’explorer les aspects saphiques de l’histoire). Si on retrouve ici l’idée d’une relation homo-érotique qui s’installe entre Susan et Carmilla/Mircalla, La Mariée sanglante propose surtout de revisiter le pourquoi de l’influence de Carmilla sur Susan, offrant ainsi la possibilité à la jeune femme de se venger d’un mari violent. Ce que Carmilla a elle-même vécu (et ce qui lui a valu l’opprobre de sa famille et de la loi – elle a tué son mari le soir de la nuit de noces –). D’un côté, Susan qui sent le dégout qu’elle éprouve pour son époux croître, de l’autre ce dernier qui cherche dans la psychanalyse freudienne (le complexe de Judith) les raisons des tourments dont est atteinte sa femme.
Globalement, le jeu des acteurs est plutôt efficace, même si c’est bien le duo Susan/Carmilla qui se détache. Le film possède par ailleurs une charge onirique assez présente, entre les scènes de cauchemar de Susan, ou la scène où le mari déterre Carmilla, au moment même où il enterre le poignard de cette dernière. Reste que le film est alourdi par plusieurs invraisemblances et raccourcis (comment Susan et son mari en sont-ils arrivés à la conclusion que Carmilla était la source du problème ?) qui peuvent ceci dit témoigner de coupes scénaristiques malhabiles, ou de coupes au montage. Reste que cela parasite la narration, même si la conclusion du film n’est pas impactée.
Adaptation (même si très libre) du roman de Le Fanu oblige, il y a bien évidemment un aspect vampirique au film. Que ce soit dans les morsures que laisse Carmilla/Mircalla quand elle embrasse ses victimes (victimes qui ne semblent pas pour autant forcées), ou dans l’idée qu’elle repose dans un cercueil, une fois la nuit tombée (Elle ne semble donc pas craindre le soleil). Pour autant, si le sang est très présent dans le film, Carmilla ne semble pas en avoir besoin pour assurer sa survie.
Un film assez intéressant dans l’éclairage qu’il propose sur l’histoire du personnage de Carmilla (cela semble d’ailleurs être un aspect incontournable dans les adaptations cinéma du roman : donner un sens à la malédiction dont est victime la vampire). Tout en se parant des atours d’une charge contre les violence faites aux femmes mariées (voire d’une charge contre le mariage tout court). Pas parfait, car il y a des raccords assez abracadabrantesques, mais l’ensemble vaut le coup d’œil. A noter par ailleurs le souci de complétion d’Artus Films, qui a choisi de structurer le film vis à vis de la version française, qui possède des scènes absentes de la VO. Du coup, lors du visionnage de versions sous-titrée, la bande son passe par deux fois en VF, de manière à y inclure ces scènes.