Alexandre et Livia, deux jeunes amoureux sans histoires, passent des vacances en Roumanie, pays d’origine de la jeune fille. C’est dans l’idée de s’immerger dans ce pays qu’elle a quitté voilà 16 ans que Livia a motivé son compagnon à la suivre. Ce dernier, quand à lui, y voit l’opportunité de trouver de nouvelles idées pour une exposition photo en cours de montage. Mais, alors qu’ils sortent éméchés d’un restaurant, Alexandre est renversé par une voiture, et doit être transfusé rapidement, ayant perdu beaucoup de sang. Contre toute attente, le jeune homme se remet et le couple retourne en France. Mais le photographe est persuadé de ne plus être le même. Cemme si le sang qui lui a été donné l’avait transformé…
Les films de vampires francophones ne sont pas légion (le plus récent, Livide, remontant à 2011), aussi ne pouvais-je manquer de me pencher sur cette réalisation signée Olivier Béguin, dont c’est le premier long-métrage. Au fur et à mesure du film, un constat s’impose : que ce soit au niveau du scénario, du jeu d’acteurs, des SFX… l’équipe a choisit la sobriété, se concentrant davantage sur les aspects psychologiques de ses personnages. Obligation de moyen, sans doute, mais qui sert au mieux le film, lequel prend rapidement la tournure d’une chute dans la folie pour Alexandre (interprété sans fioritures mais avec justesse par Yannick Rosset), le protagoniste principal. Est-il en train de s’imaginer avoir des canines démesurés, une aversion du soleil et l’envie de boire du sang, ou s’agit-il uniquement d’une séquelle de son accident, mêlée aux légendes du pays dont il revient tout juste ? A noter a ce titre le jeu particulièrement convainquant de Jasna Kohoutova, qui campe une Livia très convaincante (jusqu’à une scène de baston finale assez bluffante). Sans même parler de la présence au casting de Catriona McCall, ancienne égérie de Lucio Fulci.
Le film n’est cependant pas uniquement orienté sur cet aspect psychologique. La violence devient frontale dans le dernier tiers du film, qui voit l’ambiance changer du tout au tout. Comme si trancher entre folie et réalité faisait également basculer la violence jusque-là sous-jacente vers quelque chose de plus direct (ce qui se matérialise par des agressions physiques, et une présence plus bestiale du sang, prélevé à mêmes les victimes).
Je mentionnais plus haut Livide, le film de Maury et Bustillo. Chimères n’est absolument pas dans le même moule, et serait davantage à rattacher du film Nous sommes la nuit, notamment par la dominance de la sphère urbaine (l’essentiel du film se déroule au cœur d’une ville, de ses banlieues pauvres…) sur l’aspect folklorique (si la Roumanie est présente, ce n’est pas elle qui sera le lieu de l’essentiel de l’intrigue, même si elle sera celui du basculement).
Côté vampires, le film intègre des références aux caractéristiques classiques du mythe. A commencer par l’importance du reflet (même si ici il est visible), les canines développées et la douleur de supporter les rayons du soleil. Par la suite, boire le sang s’avérera pour Alexandre le moyen incontournable pour apaiser son mal être, de même que la résistance physique (dans une certaine limite) et la rapidité semblent faire partie de son état de vampire. Mais, encore une fois, s’agit-il d’un trouble causé par le choc qu’il a vécu ou une réalité difficilement concevable ? Bonne idée, enfin, de commencer par débuter le film en Roumanie, pour poursuivre l’intrigue en Suisse. Comme si le réalisateur choisissait d’ancrer son film dans les poncifs pour mieux s’en éloigner.
Un film au ton assez surprenant, assez sombre au niveau de sa photographie (les scènes de jour et d’extérieur, peu nombreuses dans le premier tiers, se réduisant au fil du film) qui montre qu’on peut encore proposer des variations personnelles autour de la figure du vampire sans pour autant disposer de budgets pharaoniques. Et pour un résultat autrement plus percutant.