Le capitaine Klaus Woermann arrive dans une petite ville perdue des Carpates. Ses ordres sont d’investir la forteresse locale et de protéger l’accès au défilé à l’entrée duquel elle se situe. Mais les lieux laissent une impression de malaise au capitaine, d’autant que le gardien local le met d’emblée en garde. Dès la première nuit, certains des soldats sont sauvagement massacrés. Rapidement dépassé par les événements, Woermann demande de l’aide, qui prendra le forme d’un groupe de SS sous le commandement de Kaempffer. Menaçant les villageois de représailles, celui-ci apprend que seul un historien juif serait en mesure de les aider à élucider les mystères de la forteresse.
Le long-métrage de Michael Mann, adapté d’un roman de F. Paul Wilson, est à considérer comme un film maudit. Un montage endeuillé par le décès du responsable des SFX, des acteurs éreintés par le perfectionnisme du réalisateur. Pour finir par un montage final qui raccourcit les 3h30 prévues par Mann et 1h30. En résulte une œuvre bancale, dont la mise en place glaçante fourmille de bonnes idées (l’arrivée des allemands dans le village, la rencontre avec le gardien, etc.) qui se retrouvent vite entachées par des coupes brutales (d’où viennent les deux protagonistes qui s’affrontent à la fin, pourquoi ces croix, …) qui nuisent fortement à l’ensemble. Sans parler des effets spéciaux, qui pêchent par un côté souvent cheap (ce même en prenant en compte l’âge du film).
Reste malgré tout plusieurs très bonnes choses : la reconstitution du village des Carpates est réussie (le film a été tourné au pays des Galles), à mille lieu de la vision que pouvait en donner les films de la Hammer, par exemple. Certains acteurs s’en sortent pour le moins bien : Jürgen Prochnov, (Woermann), Ian McKellen (Le Dr Cuza), voire Alberta Watson (Eva). Réduit à sa plus simple expression, le personnage joué par Gabriel Byrne peine par contre à convaincre. Et si la charge anti-nazie que représente le film (qui passe au centre du récit, à la différence du roman d’origine) ne manque pas d’intérêt, elle en oublie (la faute au montage ?) de donner une cohérence au reste de la narration.
Côté vampire, on met un certain temps à comprendre de quoi se nourrit réellement la créature qui est prisonnière dans la forteresse. Pour autant, elle partage de nombreuses caractéristiques avec les vampires : elle ne se déplace que la nuit venue, est maintenue captive à l’aide de croix et est doté de pouvoirs hors du commun (celui de ce transformer en brume, notamment). Sa Némésis, qui apparaît plus tardivement, a lui aussi certains caractères vampiriques. S’il se déplace à la lumière du jour, il n’a pas de reflets dans le miroir et peu influencer la psyché de ses interlocuteurs.
Au vu de la première partie de La forteresse noire, on peut difficilement parler d’un ratage complet. Les coupes trop violentes dans le montage d’origine laissent à penser que le montage final prenait davantage de temps pour poser toute la complexité du roman d’origine (la genèse des deux antagonistes en tête), et amener leur face à face. Ici, si la mise en place de l’histoire prends son temps, la suite semble procéder par avancées brutales et peine à vraiment convaincre. Reste à espérer, un jour, un Director’s Cut de la chose, mais c’est a priori mal parti, Michael Mann ne voulant plus entendre parler du film.