Alors qu’un prince menace de les livrer au Dieu du Néant, Pandora et son fils sont sauvés par le Capitaine des morts. Leur libération a un prix, et ils deviennent dès lors des vampires. Furieux de se voir priver de ses victimes, le Dieu transforme le prince en faucheur, une créature qui obéit à ses ordres, et qui se retrouve lancée sur les traces du Capitaine, de Pandora et de son fils. Le trio finit par trouver refuge dans un manoir du sud de la France, flanqué de l’équipage du capitaine et des monstres qu’ils ont rencontrés durant leur fuite. Mais Petit Vampire s’ennuie de cette vie cloitrée, où il ne peut sortir de la bulle protectrice générée par la magie du Capitaine. Un soir, accompagné de Fantomate, son chien, il quitte la vieille demeure et se rend dans une école. Là, il découvre un cahier appartenant à Michel, un jeune orphelin qui vit avec ses grands-parents.
Petit Vampire est un vampire emblématique de la BD franco-belge, dont les premières histoires sont publiées en 1999. Pour autant, dans l’interview bonus du DVD, Joann Sfar révèle que le personnage le suit depuis son enfance. Ayant perdu sa mère jeune, Sfar a mis beaucoup de lui dans le personnage de Michel, et dans la façon dont le film (et tout ce qui existe autour du protagoniste éponyme) traite avec justesse des thèmes forts, tel que le fait d’évoluer au sein d’une famille « tordue ». Dans le même temps, le réalisateur se place sous le patronage d’autres visages emblématiques de l’illustration, comme Snoopy et Le Petit Nicolas. Notamment dans leur propension à aborder les angoisses et joies de la vie dans des œuvres à destination des plus jeunes. L’un des fils rouges de cette adaptation animée est aussi la confrontation entre le monde des adultes et celui des enfants, symbolisé par Petit vampire qui aura jamais troit-cent ans dans un corps de petit garçon.
Le long-métrage est un prolongement de la deuxième série, publiée entre 2017 et 2019, qui est une relecture différente de la saga originale. Ici, l’auteur choisit de se focaliser sur la genèse des personnages, ainsi que sur la menace qui pèse sur leur existence. Au fil du métrage, la trame offre au spectateur d’aborder — parfois par la bande, parfois plus directement — de nombreux thèmes comme le consentement, l’amour, l’amitié, l’acceptation d’autrui. L’ensemble ne souffre d’aucun temps mort, les dialogues s’enchainent à grande vitesse, de même que le récit. Sfar montre aussi son amour du cinéma, celui des films d’horreur de la Hammer (plusieurs films avec Peter Cushing et Christopher Lee sont cités explicitement), ou encore l’affiche de Nosferatu qui orne les murs de la chambre de Petit Vampire.
Sur le plan visuel, on retrouve le style de Sfar, et le coup de crayon de la dernière série, publiée chez Rue de Sèvres. Le passage à l’animation est fluide, mais on peut y voir un effet de la méthode utilisée par le réalisateur. Dans les bonus, il révèle avoir engagé des acteurs pour jouer les scènes, avant qu’il ne les dessine. Il y a aussi un parallèle important à faire entre les différentes complexités graphiques (la synthèse représentée par un personnage comme Petit Vampire, et les détails d’un protagoniste tel que le Capitaine) et la diversité du casting.
Petit Vampire et sa mère sont transformés en vampire au moment où ils mettent la première fois le pied sur le bateau du capitaine. À partir de là, ils ne supportent plus l’exposition directe à la lumière du soleil. Ils sont par contre en capacité de voler, et de transformer leur corps à volonté (on voit le héros se métamorphoser en souris). Si Petit Vampire dort dans un cercueil, il révèle à Michel que c’est plus par traditionalisme. Enfin, il y a cette idée que les humains ne peuvent accéder au monde où vivent Petit Vampire et les siens que s’ils sont invités à franchir les portes du manoir. Un renversement assez évident de l’idée qu’un vampire doit être invité pour pénétrer quelque part.
Un long métrage d’animation qui synthétise la dernière itération en bande dessinée du Petit Vampire de Joann Sfar. Les bonus donnent dans le même temps un éclairage important sur la genèse du personnage, et son statut vis-à-vis du réalisateur-scénariste.