La voiture de Gerald et Marianne Harcourt tombe à court d’essence alors que le jeune couple parcours l’Europe de l’Est pour son voyage de noce. Ils finissent par trouver refuge dans le seul hôtel d’un petit village perdu. Là, ils ont la surprise de découvrir qu’ils sont les seuls clients, et que les chambres n’ont pas été utilisées depuis longtemps. Rapidement, ils font la connaissance du Dr Ravna et de ses deux enfants, Sabena et Carl. Tous trois, qui vivent isolés dans le château qui surplombe le village, semblent posséder une forte ascendance sur les habitants. Après une soirée auprès de la famille, Gerald et Marianne sont invités à un bal qui doit se tenir d’ici à dans quelques jours. Sachant que l’essence dont ils ont besoin n’arrivera que le lendemain de cette soirée, les Harcourt acceptent avec plaisir. Mais le professeur Zimmer, qui vit en ermite dans les environs, ne cessent de les enjoindre de partir et de se méfier.
Kiss of the vampire est un jalon important dans la longue romance qui unit la Hammer à la figure du vampire. Il s’agit en effet du premier film qui s’écarte du personnage de Dracula, même si The Brides of Dracula (Les Maîtresses de Dracula dans la langue de Voltaire) ne convoque la figure du comte que par son titre (et utilise le personnage de Van Helsing, toujours campé par Peter Cushing). Le film de Don Sharp se place également à une époque plus moderne que d’habitude (qu’on peut situer vers 1910), même si cette dernière transparaît uniquement dans le véhicule avec lequel le couple fait son apparition. Le reste du récit, qui se place une fois de plus dans une Europe de l’Est fictive, ne dépareille pas des habitudes prise par le studio avec Horror of Dracula et Brides of Dracula.
Le film se démarque des deux précédents autant par son réalisateur, Don Sharp, dont c’est le premier film fantastique, que par son approche du vampirisme. Ici, les vampires sont présentés comme des décadents qui ont voués leur âme au mal (on pense à une secte et à son gourou, quand Ravna et ses ouailles sont parés de toges blanches), et n’aspirent qu’à dévoyer les innocents. Le recours à la magie noire est également une grande nouveauté du film : a priori ces éléments étaient prévus pour The Brides of Dracula, mais Cushing aurait rejeté ce recours, peu crédible entre les mains de Van Helsing. Pour autant, la trame possède en son sein de nombreux éléments renvoyant au roman de Stoker : le personnage du chasseur de vampire, l’opposition entre rationnel et surnaturel (le héros croit en Dieu mais pas en la manifestation tangible du mal), etc.
Notons également que le film se divise en deux parties distincte : l’un constituée de la rencontre entre le couple Harcourt, les quelques habitants du village, puis la famille Ravna, l’autre constitué du bal organisé par les Ravna, et ce qui en découle. Ce bal est à n’en pas douter l’une des principales influences de Polanski pour son Fearless Vampire Killers (le bien connu Bal des Vampires), tant l’esthétique et certains ressorts scénaristiques (les personnages sont masqués) sont les mêmes.
En ce qui concerne les vampires, on est en présence d’une approche assez classique. Ils craignent la pleine lumière du soleil (mais peuvent se déplacer la journée en prenant leurs précautions). Leur morsure leur permet d’influencer leurs victimes, et de les faire agir à leur guise, avant que la transformation finale n’opère. Ils sont doués d’une force surhumaine, mais peuvent être tués si on leur enfonce un objet en plein cœur (ce qu’on voit dès les premières images du film). Pour en finir avec Ravna et sa clique, Gerald Harcourt et le Professeur Evans auront recours à la magie noire, qui fera déferler des nuées de chauve-souris sur les vampires, lesquelles s’abreuveront du sang de ces derniers. La croix est également présente comme un moyen de repousser les vampires.
Un bon cru de la Hammer, et un des premiers films à essayer de s’affranchir du personnage de Dracula. Mais aussi un film dont l’influence sur l’histoire du vampire au cinéma est notable, ne serait-ce que pour insufflé l’idée du Bal à Roman Polanski. Elephant Films a récemment réédité en Bluray et DVD le film, qui propose en supplément deux présentations de Nicolas Stanzick, qu’on ne présente plus. L’une détaille l’historique du studio anglais, l’autre se consacre au film. Nul besoin de dire que ces suppléments justifient à eux seuls l’achat de cette édition. Sachant que cette dernière s’enrichit d’un livret de 20 pages et d’une très réussie jaquette réversible.