Bonjour Marco. Pouvez-vous vous présenter pour les internautes de Vampirisme.com ?
Bonjour à tous ! En premier lieu, merci pour cette interview, c’est un grand honneur et un plaisir. Mon nom est donc Marco Fontanili. Je suis un illustrateur et auteur de bande dessinée italien, principalement pour l’industrie américaine et, en ce moment, dans le monde de la BD française. J’ai depuis toujours été un fan d’horreur (films, livres et jeux vidéos), et on peut dire que mes projets sont liés à ce genre, d’une façon ou d’une autre.
Fin 2024, vous avez lancé une campagne de financement participatif pour un projet d’album autour de Nosferatu. Comment est né cette envie de vous emparer à votre manière du film de Murnau ?
J’ai commencé de travailler à ce projet au mois d’avril 2023. J’ai toujours ressenti une connexion incroyable et inexplicable avec Orlok, c’est quelque chose que je ne contrôle pas. Encore aujourd’hui, après toutes les recherches que j’ai effectué autour du personnage et du film, et après le temps que j’ai passé avec lui, je ne suis pas capable de déterminer ce qui pourrait expliquer cette connexion. Je me souviens qu’à un moment, j’étais vraiment dans une période très ombre, je me sentais vide, et j’avais besoin de quelque chose pour m’aider à combattre tous ces sentiments. Le cinéma ets venu à mon secours, et Orlok a commencé à apparaître de plus en plus souvent. Son image, à ce moment-là, m’a heruté profondément, jusqu’à porter un coup à mon âme humaine assoupie. J’ai pu me réveiller grâce à ce personnage. Il m’a réellement sauvé la vie. Ce livre est donc aussi un moyen de dire « merci ».
Qu’est-ce qui vous a amené à construire votre histoire autour des créateurs du film, à explorer son immortalité face à l’adversité, et à conclure sur un événement relativement récent – la disparition de la tête de Murnau ? Dans les notes, vous mentionnez ainsi avoir abandonné assez rapidement l’idée d’une adaptation fidèle ?
Oui, ma toute première idée a été de faire une adaptation littérale du film. Je travaillais sur les storyboards, et c’est là que j’ai commencé à découvrir l’histoire derrière le film, qui m’a semblée plus intéressante à raconter à mon audience. Et il y avait quelque chose dans ses storyboards de départ qui me demandait: quel est l’intérêt de proposer une simple transposition ? Où est-ce que je peux mettre ma « voix » dans ce genre de projet ? Disons qu’en me posant ces questions, ca a été assez simple de mettre à la poubelle mes premiers travaux, et de tout recommencer à nouveau. J’ai travaillé tout le livre en improvisant, que ce soit les liens entre les scènes, les personnages, tout ce qui s’est imposé à moi l’a été sans aucun contrôle. Chaque jour était une nouvelle aventure.
Visuellement, votre style et les cadrages démontre une intension d’être en connexion avec le mouvement expressionniste, qu’on associe au film. Pour vous, cette approche graphique était essentielle ? Que pensez-vous que cela ajout ?
Je suis incapable de dire si cela était essentiel pour le projet, mais ça l’était pour moi. J’avais besoin d’une approche graphique « extrême », pour me débarrasser de toute la négativité que j’avais en moi. C’était comme une thérapie. Quand on y pense, le mouvement expressionniste des années 1920 était né pour les mêmes raisons. Et travailler avec ce style demande de réfléchir de manière totalement différente, on travaille pour exprimer et explorer notre moi intérieur. J’ai passé BEAUCOUP de temps seul dans mon studio, à creuser mon âme et mon cerveau, essayant de trouver et de comprendre ce qui me causait tout cette peine, cette absence de volonté de vivre. J’espère que cela ajoute de la sincérité et un « coeur » au projet, c’est tout.
Nosferatu est sorti en 1922, et son deuxième remake est arrivé en salle en 2025. Comment expliquez-vous que ce qui n’était à l’origine qu’une adaptation non autorisée est parvenue à s’émanciper du Dracula de Bram Stoker ?
C’est une bonne question. Il est probable que tout commence avec le fait que maintenant, on dispose d’un grand nombre de films avec Dracula, et tous ont aidé à lui créer une identité qui le rend trèèèèès différent de Nosferatu. Lequel demeure incroyablement unique, plus d’un siècle après sa création. Physiquement et psychologiquement, ce sont des entités très différentes.
Quelles ont été vos premières et dernières rencontres avec la figure du vampire, que ce soit en littérature, au cinéma ou sur un autre support ?
Ma première rencontre avec le vampire a eue lieu quand j’étais très jeune, grâce à un épisode de la série TV Chair de Poule. Le titre de cet épisode était (et est toujours) « Le Souffle du Vampire » (« Vampire Breath » en VO). Il m’a fait vraiment flipper quand j’étais enfant haha ! Cette série a de façon générale changé ma vie. Et ma plus récente rencontre avec un vampire, je la dois au film Le dernier voyage du Démeter, que j’ai vraiment apprécié.
Quels sont vos projets à venir ? Vous avez réalisé des recherches approfondies pour cet album, comme vous le montrez dans les notes qui accompagnent l’album. Pensez-vous avoir épuisé le sujet, ou y-a-t-il davantage à explorer autour de Nosferatu ? Vous n’avez absolument pas mentionné les deux remake dans l’album, par exemple.
Actuellement, je terme une petite parodie du classique Steamboat Willie (NDT : Troisième film de la série Mickey Mouse, considéré comme la naissance officielle du personnage). Ma version est un peu plus orientée horreur, et le titre que j’ai choisi est Steamboat Evil. Cette histoire sera disponible d’ici la fin de l’année, j’espère. Après ça, je veux faire une adaptation en BD de « La Déclaration de Randolph Carter » (en VO : « The Statement of Randolph Carter »), la nouvelle écrite par H.P. Lovecraft. Je pense avoir trouvé une manière intéressante de raconter cette histoire et je suis impatient de commencer à travailler dessus. Et pour répondre à votre autre question : non, je ne pense pas en avoir fini avec Nosferatu. J’ai envie d’écrire et de dessiner une histoire originale autour du personnage et de son univers. Je ne sais pas quand cela arrivera, mais j’éprouve encore le désir de travailler avec / sur lui.