Pour les lecteurs qui ne connaîtraient pas encore VHB, pouvez-vous nous résumer la genèse du projet ?
Au début il s’agissait d’un univers que j’avais développé pour des jeux de rôles au Lycée. J’y ai mélangé plein d’éléments : science-fiction, uchronie, fantastique, polar, action. Au début c’était juste conçu pour être un défouloir entre deux parties sérieuses, mais comme je suis un maniaque de la cohérence j’ai travaillé à rendre tous ça logique. Et je me suis rendu compte, au final, que c’était un terreau très riche pour y créer une série où l’on pourrait suivre des personnages comme on le fait dans des séries télé comme Urgence, NY 911, et autres, mais avec des vampires, des loups-garous des vieilles voitures et des armures high-tech.
Alors j’ai entrepris l’écriture de scénario de BD classiques (46 pages, format franco-belge). Quand j’ai rejoint l’association Phylactères (qui publiait et publie encore la revue NON?Si!) je me suis dit que finalement, le format « fanzine », était pertinent pour développer cet univers et ces personnages en toute liberté et j’ai rencontré dans ce collectif d’auteurs beaucoup de dessinateurs qui ont accepté de me rejoindre sur ce projet, notamment les 6 co-créateurs de la série, ceux qui réalisent tous les designs des personnage et décors récurrent : Asid, Jim’Haï, David Bulle, Damien Malglaive, Philippe Haderer et El’Théo.
Quels retours avez-vous pour le moment sur les 5 tomes qui composent la série ?
Tout d’abord, les gens se montrent forcément plus conciliant avec nous puisqu’il s’agit d’un fanzine autoproduit avec un tirage plutôt marginal (300 exemplaires pour les premiers tirages). Mais nous avons un lectorat de plus en plus conséquent. Comme nous sommes à la frontière de plusieurs genre : entre la BD franco-belge et le Comics, entre la BD d’auteurs et la BD mainstream, entre le polar classique et la BD d’action, le lectorat est très varié. Et surtout on peut être très proche de lui et écouter ses remarques et critiques, et apprendre de tout cela pour parfaire notre travail. Il s’avère aussi que les choses qui n’étaient pas évidentes au début (comme le fait qu’il s’agisse, dans chaque numéro, d’histoires courtes assemblées non chronologiquement) intéressent de plus en plus les lecteurs et deviennent des atouts au projet.
Comment se passe la mise en place d’un nouveau numéro de VHB ? Est-ce toi, Lokorst, qui propose les histoires à des dessinateurs que tu as en tête où sont-ce les dessinateurs qui choisissent eux-mêmes leur segment ?
Chaque numéro se doit d’avoir une certaine autonomie (vu qu’il n’y pas réellement d’ordre de lecture), donc il me faut être très précis dans l’écriture pour proposer le plus possible des récits autonomes, mais complémentaires les un des autres. Il faut aussi veiller à la cohérence dans l’évolution des personnages et de l’enchaînement des moments clés dans l’intrigue générale. L’idéal et quand j’ai déjà le scénario, puis que je le soumets au dessinateur dont le style correspond à mon idée pour ce récit et qu’il accepte.
Mais tout arrive. Et parfois, quand c’est le dessinateur qui me sollicite et qu’il me dit le genre de récit qu’il aimerait dessiner, de nouvelles idées arrivent et le scénario est écrit spécifiquement pour lui. C’est pour cette raison, par exemple, que le nombre de numéro pour la première saison (environ 15), fluctue souvent.
Pourquoi avoir opté pour une chronologie éclatée ? De quel manière cela impacte t’il sur le travail de chacun ?
Au début c’était juste du pragmatisme éditorial. Comme personne n’était payé, et qu’on ne pourrait jamais prévoir quand sortirait le numéro suivant, il m’a semblé risqué de faire des récits avec marqué « à suivre » à la fin. Ce qui imposait donc des récits relativement clos. Ensuite, pour sortir régulièrement je me suis dit qu’il faudrait lancer la production de plusieurs numéros en même temps. Et, en tant qu’amateur, nous ne sommes jamais à l’abri d’un contretemps nous amenant à modifier l’ordre des numéros. Du coup il paraissait plus simple de ne pas raconter l’histoire dans l’ordre chronologique, mais de composer des numéros par thématique.
Au niveau artistique, cela m’impose un énorme suivi de la chronologie pour que les récits, lus dans le bonne ordre, ne se contredisent pas et soient bien raccords. Un peu le travail d’une scripte sur un tournage. Du coup, en plus du respect des références, les dessinateurs se retrouvent avec des contraintes supplémentaires qu’ils ne comprennent pas forcément jusqu’à ce qu’arrive enfin l’histoire qui explique tout.
Au final, la contrainte est devenu un jeu pour les lecteurs et pour les auteurs.
A quel moment son dessinées les couvertures ? Y’a t’il un travail de scénarisation sur celles-ci ?
Oh, oui elles sont scénarisées. La plupart du temps, j’ai l’idée exact de la couv’ que je veux. C’est le cas des 3 premiers numéros. Là j’en parle au dessinateur, en l’occurrence Asid, et il m’amène un paquet d’idées supplémentaires, jusqu’à ce qu’on soit d’accord sur le concept. Parfois, j’ai moins d’idées et c’est le dessinateur qui amène l’idée première qu’on discute ensuite. Mais l’idée est bien, à chaque fois, d’avoir une couv’ qui ne représente pas un moment du récit, mais qui est plus une clé de lecture du numéro. Le titre joue également ce rôle. C’est pour cela que la réalisation de la couv’ ne commence jamais avant la fin de l’écriture des scénarios.
Quelles ont été vos premières et vos dernières rencontres avec un vampire (littéraire et/ou cinématographique) ?
Mes premières rencontres… Bien sûr il y avait les images des vieux films de la Hammer. Mais le premier film fut réellement le Dracula de Coppola. Et en littérature Lestat le Vampire d’Anne Rice. Mais passé ces œuvres, la figure du vampire romantico-gothique m’a un peu lassée. Alors que je passe beaucoup de temps à écrire de récits avec des vampires, je dois confesser que je ne suis pas un grand fan de récits vampiriques en tant que tel, enfin ceux axés romantisme/sexe/gothisme qui sont un peu la norme actuellement. Du coup il m’est difficile de me rappeler mes dernières rencontres. Je me suis refait une petite session Buffy, ça compte ?… il va falloir que j’épluche Vampirisme.com pour me dénicher des lectures qui pourront m’intéresser.
Pour vous, comment peut-on analyser le mythe du vampire ? Qu’est ce qui en fait la pérennité ?
Vaste question. Je crois qu’il y a tellement d’images collées au vampire qu’il est difficile d’en appréhender toute la complexité. Ce qui me plaît c’est qu’on arrive à mettre énormément de concepts derrière juste ce mot. C’est à la fois la créature de la nuit, un catholicisme myst
ique, l’image d’une noblesse au dessus des hommes, un aspect animal et sexuel, etc. Du coup, en fonction des époques et des lieux, on peut utiliser cette figure pour parler de telle ou telle réalité, mettre en exergue tel peur ou fantasme.
Pour ma part, de gommer la barrière fantastique (comme genre de récit) en ne faisant pas des vampires des êtres de l’ombre, mais des gens dont tous le monde connaît l’existence, me permet d’aborder le vampire, non plus comme mythe, mais comme une autre face de l’humanité. Parce que la base de l’univers de V.H.B. est de dire : les vampires existent, tous le monde le sait et ils sont des citoyens comme les autres. Mais le lecteur comprend d’emblée que c’est plus facile à dire qu’à mettre en place et qu’il va y avoir forcément des problèmes.
Quelle va être l’actualité du projet et des ses participants dans les semaines et les mois à venir ?
Un sixième numéro est en préparation, un septième en écriture et encore 7 sont prévus pour boucler le premier volume. Ensuite on s’attaquera au 2ème volume, etc. Bref, encore beaucoup de récit à venir. Et sinon, il s’agit de continuer à faire connaître notre revue, essayer de retravailler le plus possible avec les auteurs qui nous ont fait confiance, et petit à petit professionnaliser ce projet.