Monsieur Petroulakis ne sort jamais de son appartement, qui renferme tout ce dont il peut avoir besoin. Ses provisions lui sont amenées chaque vendredi, apportées par l’épicerie du coin. Pourtant, un jour, le livreur ne se présente pas. Son chat Fantômas n’ayant plus de pâté, le voilà forcé de quitter en pleine journée son immeuble, et de prendre la direction de la supérette. Si le trajet aller se passe sans encombre, Monsieur Petroulakis se perd en tentant de revenir chez lui. Il se voit alors obligé de demander son chemin, et fait à cette occasion la connaissance de Zoé. L’irruption de la jeune fille dans la vie du vieux monsieur va considérablement bouleverser son quotidien. Car Monsieur Petroulakis l’avoue d’emblée à Zoé : il est un vampire.
Nouvelle rencontre entre la littérature jeunesse et la figure du vampire, Vampire un jour, vampire toujours est une histoire imaginée par Davide Calide et Sébastien Mourrain. Le duo a à son actif plusieurs récits illustrés pour le même éditeur, Acte Sud : Chez moi (2016), Petit Pois (2017) et L’école de dessin de Petit Pois (2022). Les deux auteurs ne font pas que travailler ensemble, et ont chacun plusieurs titres jeunesses à leur actif, chez différents éditeurs. Davide Calide, le scénariste, a plus d’une soixantaine de titres à son actif. Il a fait ses débuts en Italie même s’il publie depuis quelques années principalement pour la France. Sébastien Mourrain a quant a lui plus d’une trentaine d’albums illustrés au compteur.
La trame de Vampire un jour, vampire toujours est plutôt originale, avec ce personnage qui a tout du vampire et vis cloitré, sans aucun contact avec la société humaine. Il y a là l’idée de l’immortalité du vampire, une entité hors du temps qui finit par se détacher de celui-ci. La question de la mémoire de la créature est également au cœur de l’histoire, Monsieur Petroulakis ayant des difficultés à se rappeler de son passé. Le texte joue dans le même temps sur la définition du vampire, en imaginant une explication rationnelle à la condition surnaturelle dont se revendique M. Petroulakis.
Le récit est très joliment illustré par Sébastien Mourrain, dont le trait fin et gracieux donne vie aux différents protagonistes. L’ensemble est rehaussé d’une mise en couleur à l’aquarelle, qui appuie sans trop insister sur les moments oniriques de l’histoire.
M. Petroulakis vit dans un cadre gothique, un vieil immeuble parisien aux airs de château, avec son immense salle de télescope. Il est intégralement vêtu de noir, et ne semble jamais affronter la lumière du jour. Lorsqu’il le fait, il finira par explique à Zoé — qu’il rencontre à cette occasion – être un vampire diurne. M. Petroulakis profite de ses soirées pour planer au-dessus de la ville, utilisant pour cela la machine volante qu’il s’est lui-même fabriqué. Le jeu sur la réalité vampirique du personnage traverse enfin l’album. Il y a ce doute, quand on apprend qu’il a été pilote d’un vampire, un modèle d’avion (qui a vu le jour après la Seconde Guerre mondiale). Mais dans le même temps, il y a le cas du canari, qui semble mort au début de l’histoire et reprend vie du moment où celle de M. Petroulakis se fait plus animée. Il y a également les jeux d’ombres qui émaillent les scènes où M. Petroulakis se déplace dans son appartement, comme en résonance avec le Nosferatu de Murnau.
J’ai eu l’occasion de découvrir cet ouvrage avec mon fils de 7 ans, qui a surtout retenu le cadre parisien (La Tour Eiffel), l’avion créé de toutes pièces par Petroulakis et les facéties du chat. Pour moi, il y a aussi en filigrane le rapport entre les générations, la mémoire et une certaine idée du temps qui passe. Une très sympathique lecture au final, pour les petits comme pour les grands.