Les Del Toro – le clan de vampires à la tête du crime organisé à Miami – sont beaux, riches et immortels. Ces suceurs de sang sont maîtres dans l’art de poignarder dans le dos et de se quereller. Et lorsque leur patriarche, Eduardo, est assassiné, ils sortent vraiment les crocs. Le fils cadet, Leto, est entré dans les ordres et a tiré un trait sur sa famille et ses péchés. Son ambitieuse soeur, Risa, s’en réjouit. Mais dans son testament, Eduardo fait de Leto son héritier. Il écarte ainsi sa fille et met les convictions de Leto à rude épreuve. Si la foi peut déplacer des montagnes, elle n’émeut pas forcément et elle ne change pas les mentalités. Leto et Risa apprendront bien des choses sur les limites du pouvoir, de la foi et de l’appétit…
Si la couverture de Frank Quietly avait quelque chose de très accrocheur, et que le dessin intérieur est de bonne facture, l’ensemble de ce copieux pavé (plus de 200 pages) ne vaut pas vraiment le détour. Chaykin et Tischman (qu’on avait déjà pu croiser sur le très moyen premier arc du comics True Blood) proposent ici une histoire à mi-chemin entre Le parrain et Vampire la mascarade, pour un résultat franchement peu accrocheur. Car les différents arc qui composent ce big book sentent franchement le réchauffé, et n’offrent pas une once d’originalité à l’ensemble, qu’on pourrait rapidement taxer d’opportunisme.
Si on met de côté le scénario, les personnages n’ont eux non plus pas grand chose de très savoureux. Tous sont des archétypes du genre, entre la riche héritière bi(voire tri)sexuelle qui n’hésite pas à se salir les mains, l’héritier programmé qui refuse un temps sa lourde charge, mais finit par endosser sa destinée, le neveu un peu dépassé, etc. Pas un seul des personnages des différents histoires qui constituent ce recueil ne fait preuve d’un peu de nouveauté, voire d’un peu de profondeur. Bien et mal se confondent d’un bout à l’autre, mais là où l’absence de manichéisme à tendance à me plaire, ici les réactions des personnages, leurs raisons et leurs revirements sont franchement peu convaincants.
Le dessin est assez réussi dans le genre. Sans tomber non plus dans le mainstream et ses couleurs informatisées froide au possible, on est ici plus proche de la tonalité graphique d’un Powers : des traits fin et acérés, un certain sens du cadrage, rehaussé par une utilisation des couleurs sobres et efficace, qui colle avec le ton de l’ensemble. Reste que cela ne parvient pas à sauver l’album du naufrage, et de son inconsistance.
Les vampires de cet univers partagent pas mal de choses avec ceux de la série True Blood (sur laquelle à déjà bossé Tischman). Ils ont fait leur coming out et essaient de s’intégrer dans la société. Reste que le besoin de sang qui les étreint leur demande parfois de perpétrer des exactions que certains hommes de loi ne voient pas forcément d’un bon oeil. Les pieux en bois et les balles en argent semblent des moyens efficaces d’en venir à bout, mais le soleil n’a pas l’air de les dérange outre mesure. Ils ne semblent enfin pas avoir de pouvoirs particuliers, si ce n’est une grande résistance et une longévité hors-norme. A noter que la transformation en vampire a tendance à corriger les défauts physiques des victimes. On dénombre enfin trois type de vampire : les alphas (transformés par des chauve-souris durant leur vivant), les bêtas (qui sont la progéniture des vampires) et les omégas (des humains transformés en vampire après avoir été mordus).
La quantité ne fait pas forcément la qualité, ce A crocs et à sang le démontre sans aucun détours. Un scénario qui ne brille à aucun moment pas son originalité, des personnages archétypiques, reste un dessin réussi mais qui ne parvient pas à sauver le tout. Grosse déception donc.
Bizarre, moi c’est le graphisme qui m’a un peu gêné, alors que j’ai trouvé la première partie assez "péchue" et digne d’attention (ça se tasse nettement par la suite, cela dit).