Londres 1888. Qui sont ces deux orphelines qui s’aventurent la nuit dans les rues mal famées ? Ignorent-elles qu’on peut y rencontrer Jack l’Eventreur ? Que des créatures plus terrifiantes encore, goules et vampires s’y livrent une lutte sans merci ? Mais Amber et Luna Wilcox ne sont pas des jeunes filles comme les autres. Sous leur frêle apparence se cache un terrible secret. C’est pour cela qu’elles ont été choisies. Par qui ? Impossible d’en dire plus. Sinon que la survie de l’empire britannique repose désormais sur les très étrangers soeurs Wilcox…
Fabrice Colin inaugure avec ce premier opus une nouvelle série fantastique destinée avant tout à un public jeune. Néanmoins, le style de l’auteur, la manière qu’il a de s’approprier les mythes qu’il met ici en scène (de Dracula à Sherlock Holmes en passant par Jack l’Eventreur) donne à cet ouvrage un intérêt bien supérieur à celui de séries comme Twilight ou Journal d’un vampire. Car le propos de Colin n’est pas de proposer un ouvrage de Bitlit à la française mais bien un roman de genre destiné aux plus jeunes, qui leur permet de se plonger avec délectation dans l’époque victorienne, ses monstres comme ses héros. Dracula, Sherlock Holmes, Abraham Stoker, la reine Victoria font ainsi parti de la galerie de personnages qui se succèdent ici, galerie qui du coup fait le lien entre réel et imaginaire, aboutissant sur une sorte d’uchronie jeunesse assez inspirée.
Si on est tout de même encore loin d’un Kim Newman (Anno Dracula est dans le genre un modèle difficilement surpassable), ce premier roman des étranges sœurs Wilcox introduit des éléments aussi intrigants que savamment distillés, permettant à l’auteur de répondre à des questions tout en préparant une suite tout aussi attirante. Et là ou Meyer et ses erstatz s’empressent de piller le mythe, lui retirant ses crocs et sa bestialité pour en faire un fantoche à peine romantique, Colin renoue au contraire avec ce qui a fait le succès des romans de Stoker, Le Fanu ou Polidori : une certaine noirceur, une vision sombre et profondément malsaine (pour ne pas dire déviante). Ce qui fait de ce roman un hommage vraiment intéressant qui peut être vu comme une introduction abordable à tout un pan de la littérature fantastique que les dernières évolutions du genre tendent à gommer.
Les vampires de cet opus obéissent à une structuration à base de clans qui n’est pas sans rappeler le jeu de rôle la Mascarade. La transformation s’opère par transmission de sang entre un sire et ses futurs infants, qui se retrouvent dès lors irrémédiablement liés à leur « père ». Le besoin de sang, s’il se fait fortement ressentir, peut être sustenté par absorption de sang animal, sous différentes formes. Les vampires dorment par ailleurs le jour, possèdent certains pouvoirs hypnotiques comme la possibilité de détecter les auras des humains comme des autres créatures fantastiques, et peuvent être tués après avoir été transpercés en plein cœur par un pieu. A noter ici l’existence d’un clan qui a pu s’affranchir du besoin de sang pour ne conserver que l’immortalité.
Au final, voilà un premier tome aussi agréable à lire que riche en clins d’œils à la littérature victorienne et à ses figures clés. Fabrice Colin inaugure donc ici une série prometteuse, qui trouvera (je l’espère) son public parmi les plus jeunes comme parmi ceux qu’un peu de légèreté ne rebute pas. D’autant que qualitativement parlant, on est ici dans un autre niveau que ce que peut propose une grande part de la littérature vampirique actuelle.
Bonjour,
billet très réussi. Et quelle bonne idée d’avoir inséré l’interview de Fabrice Colin.
Petit bémol dans ton article où tu dis que "par ailleurs, les vampires dorment la nuit".
Il me semble pourtant qu’ils sont irrésistiblement attirer par le sommeil dès que l’aube s’annonce (ce qui explique que Watson puis Sherlock veillent sur elles durant le jour).
ma vision par ici :
http://www.heat27.com/blog/actu-...
Autant pour moi pour l’erreur, il fallait en effet bien lire « par ailleurs, les vampires dorment le jour ». Merci d’avoir porté ce point à mon attention.
"D’autant que qualitativement parlant, on est ici dans un autre niveau que ce que peut propose une grande part de la littérature vampirique actuelle."
Tout à fait exact.
Bravo pour cet excellent papier, particulièrement documenté.
très intéressant ton billet !
et j’ai changé l’erreur sur mon blog, au sujet de "bit lit".
j’avais un peu du mal a comprendre ce qu’englobait ce terme.
Lire les aventures des sœurs Wilcox, c’est plonger dans un roman accrocheur et haut en couleur. Ce premier tome pose une ambiance londonienne où se côtoient de grandes figures de l’époque Victorienne, réelles ou fictives. Une bonne dose de suspens et de mystère rythme l’histoire de ces deux jeunes sœurs vampires qui s’escriment à démêler une intrigue riche en rebondissements. L’organisation des Invisibles et leur lutte contre Dracula révèle un potentiel des plus intéressants, tout comme l’ensemble des personnages que l’on retrouve au fil des pages. L’auteur parvient à s’approprier Sherlock Holmes ou encore Bram Stoker avec justesse et les introduits dans son récit sans fausse note.
Bien que Fabrice Colin ait allègrement pioché dans des sources d’inspirations très diverses – cinéma, littérature ou encore jeux de rôle – l’univers qu’il développe demeure cohérent, vraiment agréable et facile à lire. Un premier tome enthousiasmant qui donne envie de se plonger sans attendre dans le second roman.
Un roman très agréable à lire grâce au style d’écriture simple mais au vocabulaire recherché.On s’attache rapidement aux jeunes soeurs. C’est dernières sont très complémentaires. L’une est plutôt rebelle et curieuse tandis que l’autre est douce et calme. L’univers sombre nous permet de bien entrer dans ce Londre du XIVème où nous rencontons des célébrités comme Jacques l’éventreur. Je regrette par contre que les scènes de combats soient parfois un peu brouillon, ça part dans tous les sens. Du coup, je n’arrive pas à me les représenter ou pire je relis la scène car au final, je ne sais plus où j’en suis! J’ai en tout cas hâte de lire la suite des aventures.
Voilà une chronique particulièrement enthousiasmante ! Je craignais l’effet vampire nounours mais tu l’as démenti. Sympa le blog sur les vampires !
Un premier tome qui joue très bien avec les codes du genre version jeunesse, mais intéressant pour les plus grand aussi 🙂 Je continuerai sans aucun doute cette série.