Incapable d’expliquer le suicide de sa meilleure amie, Angèle décide de se rendre à Bucarest, sur les traces de cette dernière et de ceux qu’elle y a fréquenté, avec l’espoir de découvrir les raisons d’Andrea. Envoyée en Roumanie pour les besoins d’un article sur Dracula et les vampires, Eva se retrouve rapidement prisonnière des sous-sols du château de Bran. Le maître de céans semble en effet avoir des projets pour elle. Jeune journaliste cherchant à faire ses preuves, Gabrielle se retrouve bloquée à Bucarest, après qu’un tremblement de terre ait ravagé la ville. Mais ce sera pour elle l’occasion de découvrir l’envers du décor. Maryline Gudlin, Emilie Million et Valérie Simon nous proposent, chacune à son tour, de partir à la rencontre de Dracula, dans la Roumanie d’aujourd’hui.
L’éditeur Rebelle réitère le format initié avec Un chasseur à Paris, et propose ici un recueil de trois novellas autour de Dracula. Trois auteurs se succèdent donc pour ajouter leur contribution à la légende de Dracula, choisissant comme cadre la Roumanie d’aujourd’hui.
Le premier texte, signé Maryline Gudlin, inaugure le recueil. Force est d’avouer que l’auteur a des idées et une certaine connaissance du sujet, choisissant de faire apparaître les spectres de personnages réels comme Mircea Eliade, ou convoquant l’histoire du vrai Dracula. Pour autant, je trouve que l’intrigue manque quelque peu d’originalité, et ne sort pas des sentiers battus, malgré un travail de contextualisation assez poussé.
Le deuxième texte, signé Emilie Million, est celui que j’ai le moins apprécié. Si le pitch de départ est plutôt sympathique, et les références au roman de Stoker assez bien intégrées, la trame globale ne m’a pas convaincu, trop portée sur la romance entre l’héroïne et le maître des sous-sols du château de Bran. Si l’utilisation du vampire comme ressort d’une histoire d’amour ne me pose pas de problème, le récit manque à mon sens d’un minimum de profondeur.
Le troisième texte est donc celui de Valérie Simon. Sans hésitation, c’est celui que j’ai trouvé le plus convainquant. L’auteur choisit davantage de relier son histoire à la Roumanie moderne et au mythe du vampire que directement à Dracula. L’ambiance est assez réussie, Bucarest se retrouvant au bout de quelques pages tel un vrai no man’s land. Un texte assez sombre, qui permet à l’auteur de mettre en scène certains aspects mal connus de la Roumanie moderne (la population de SDF qui vit dans les égouts). Les codes du genre sont utilisés à bon escient et la romance pour le moins absente.
Si les trois textes ont chacun leur spécificité vis-à-vis de la figure de Dracula (et des vampires), on peut sans hésitation rapprocher les deux premiers, qui puisent plus particulièrement dans le roman de Stoker (lequel est cité plusieurs fois). Le vampire, qu’il s’agisse de Dracula ou de ses séides, est présenté comme une créature dotée de certains pouvoirs, qui doit s’abreuver de sang pour survivre. Pour autant, il peut être détruit, voire emprisonné (la thématique des chasseurs de vampires apparaît ainsi dans les deux textes). Le troisième texte s’éloigne de ces codes (même si l’auteur joue sur les éléments censés repousser le vampire, et sur certaines des caractéristiques de ce dernier, comme l’absence de reflet), en ne puisant pas directement à la source (le roman Dracula), lequel n’est mentionné que lorsqu’il s’agit d’aborder le sujet de l’article de Gabrielle.
Si tous les textes ne m’ont pas autant convaincu les uns que les autres (les deux premiers sont de facture trop classique), il y a plusieurs choses intéressantes dans ce recueil, qui donne l’occasion à des auteurs français de confronter le vampire, tel qu’il est mis en scène et perçu aujourd’hui, avec ses racines roumaines (qu’on parle ou non de facto de Dracula).