Dans le Rhône, on repêche le cadavre d’une jeune femme, dont l’autopsie révèle une particularité inattendue : la moelle épinière et le cerveau sont complètement desséchés. La presse n’informe le public que de la découverte du corps, et pas des mystères qui entourent son état. Ce que ne disent pas les journalistes, également, c’est qu’un autre cadavre a été retrouvé à quelques encablures de là. Celui-ci appartient à un membre du Comité d’Information et de Défense, un groupuscule secret dirigé par Léon Saint-Clair, plus connu sous le nom du Nyctalope. Lui et ses agents vont rapidement découvrir qu’ils font face à une secte ancienne, aussi puissance que dangereuse : les Adorateurs de Sang.
Jean de la Hire fait partie des auteurs prolifiques de la littérature populaire d’avant-guerre. Habitué de la publication sous forme de feuilletons, l’écrivain possède une bibliographie de plusieurs centaines de textes, s’essayant au policier, au roman d’aventures, à la science-fiction… Les Mystères de Lyon est un récit apparenté au merveilleux-scientifique qui met en scène le personnage du Nyctalope, un homme augmenté (il peut voir la nuit et est doté s’un cœur artificiel) imaginé par De la Hire. Initialement sorti en 1933, Les Mystères de Lyon a été réédité en 1979 chez Marabout, précédé d’une préface d’Hubert Juin.
Le texte est au croisement des genres, entre récit policier (tout commence par deux meurtres), espionnage (en raison du statut du CID) et proto-science-fiction (par les méthodes employées par les Adorateurs du Sang). Si le style peut paraître avoir vieilli, l’histoire ne manque pas de rebondissements et de personnages ciselés, à l’image de la princesse Alouh T’Hô. L’ensemble démontre que De la Hire est autant un héritier des feuilletonistes du XIXe siècle, comme Paul Féval, et un des hérauts du Merveilleux-Scientifique, par la manière dont la science intègre son récit d’aventures. Les connaisseurs de l’histoire lyonnaise apprécieront dans le même temps de voir la façon dont l’auteur s’empare de la ville de Lyon et de son statut de plaque tournante de l’ésotérisme.
En ce qui concerne les aspects vampiriques de la trame, ils reposent sur la secte des Adorateurs du Sang, dirigée par Alouh T’Hô. On comprend rapidement que lle groupuscule ponctionne le sang de ses victimes qu’elle administre à ses membres, leur permettant de prolonger leur existence et de triompher de la mort. L’un d’entre eux, capturé, révèlera ainsi qu’il est âgé de plus d’une centaine d’années. Le rituel utilisé plonge ses racines dans l’adoration des divinités Siva, Parvati et Kâhli. Une fois le liquide vital prélevé, on retrouve les corps de ces dernières comme desséchés par le procédé. On comprend également que le rituel doit être effectué à intervalles réguliers pour les bénéficiaires.
Ce premier tome lance le Nyctalope dans un face à face avec un ennemi à sa mesure, en la personne de la princesse Alouh T’Hô. Dans le même temps, l’auteur joue autour de la figure du vampire, convoquant l’aspiration à l’immortalité que symbolise la créature, tout en mettant le sang au cœur du récit.