3 ans ont passés depuis la fuite d’Herfauges et le décès de Jacques. Agnès travaille toujours pour son oncle Géraud, mais a pris davantage d’indépendance, vendant la maison de ses parents pour s’établir dans un appartement. Alors que l’étude cherche à remettre la main sur un artefact, l’augmentation des couples mixtes (composés de créatures de races différentes) cherchant à contractualiser leur union finit par attirer leur attention. D’autant que les familles des consorts viennent mettre leur grain de sable. Géraud, Agnès, Navarre et Zalia vont devoir retrousser leur manche pour empêcher l’AlterMonde de basculer.
L’Héritière, qui voyait le héros vampire de Jeanne-A Debats, Navarre (croisé dans Métaphysique du vampire et moultes nouvelles) dans un récit volontairement urban-fantasy (pour ne pas dire bit-lit), avait été une très bonne surprise. A la fois respectueux des codes du genre (la touche de romance, une héroïne attachante avec un côté badass), tout en apportant sa touche personnelle (Paris, qui s’impose vite comme un personnage à part entière), le premier opus se posait comme une une très bonne surprise. La preuve par trois que le recours aux mégalopoles anglophones n’est pas nécessaire quand on choisit de se frotter à un contexte urbain et moderne.
Cette suite, qui reprend le fil quelques années plus tard, est tout aussi recommandable. L’héroïne a évolué vers plus d’indépendance, elle se fait plus affirmée et rebelle (tout en étant fragilisée par le décès de Jacques, le loup-garou dont elle s’était éprise). Si l’auteur avait, dans le premier volet, levé le voile sur un univers riche aux multiples races surnaturelles (l’AlterMonde), cette suite voit davantage de créatures intégrer le récit, que ce soit des entités tirés de la mythologie antique (les satyres, les kères), de la sphère religieuse (anges et démons), aux côtés des classiques sorcières, garous et vampires. Les mythes s’entrecroisent ainsi avec force, tout en ne sacrifiant pas à la cohérence de l’ensemble.
Paris est à nouveau au cœur du récit, les pouvoirs d’Agnès (sa capacité à ressentir les fantômes) permettant à l’auteur de mettre en parallèle ville moderne et passée, ne rechignant pas à remonter à l’époque mérovingienne tout en jetant des ponts avec l’actualité récente (les attentats de novembre 2015). C’est finement joué, toujours aussi passionnant, et montre un amour incontestable des lieux évoqués et du passé qui s’y rattache. C’est d’ailleurs quelque chose qui fait défaut aux villes en scène dans les récits anglophones : le côté tentaculaire de ces dernières, leur modernisme ne leur permettant que rarement de disposer de racines historiques fortes.
Côté vampirique, Navarre et ses pairs permettront dans cette suite de découvrir des éléments jusque-là inconnus sur les vampires. Si on revient sur leur capacité à repousser les fantômes et esprits désincarnés, on apprendra que les plus vieux vampires disposent d’un pouvoir qui leur permet de se mouvoir à une vitesse démesurée, laissant leurs muscles prendre l’aval sur leur esprit. On apprendra aussi plusieurs choses sur leur capacité à subjuguer leurs victimes (et à contrôler ou pas ce pouvoir), et sur l’origine des pouvoirs de Navarre, qui préfère se nourrir de ceux de sa race plutôt que d’êtres humains.
On retrouve rapidement le souffle du premier opus dans cette suite tout aussi recommandable, qui voit l’univers se diversifier, et le récit mâtiner toujours avec autant de verve humour, Histoire et romance, sans que jamais l’un ne prenne le pas sur l’autre. Un équilibre particulièrement savoureux.