Raphaël est un vampire atypique. Non seulement il est aussi vieux qu’immortel, mais en outre il entretient des rapports ambigus avec le Vatican. Pour ne pas dire qu’il travaille en sous-marin pour la papauté… comme espion et assassin. Avec ses capacités vampiriques et ses visions, on comprends très bien l’intérêt que ses employeurs lui trouvent. A la faveur d’une nouvelle enquête, le voilà lancé aux trousses d’un ancien dignitaire nazi, qui se cache depuis des années au Brésil. Raphaël va peu à peu remonter la piste, bientôt accompagné d’une jeune vampire, d’un prêtre et d’un autre espion. La confrontation entre les deux monstres risque fort d’être fracassante !
Après avoir ébauché le personnage et son univers dans certains de ses anciens textes (textes qu’il va donc falloir que je lise sans tarder), Jeanne-A Débats a passé la vitesse supérieure, et propose avec ce nouveau roman une histoire centrée autour de Raphaël le vampire. Un roman qui ne cède pas à la veine Bit-lit, même s’il reste malgré tout dans le giron urban fantasy, et propose pas mal d’idées savoureuses pour les amateurs de bêtes à crocs. Si on a déjà eu l’occasion de voir des alliances religieux-vampires (dans des mangas comme Hellsing et Trinity Blood notamment), Raphaël n’est pas pour autant une copie d’Alucard ou d’Abel Nightroad. Le personnage n’est pas aussi déjanté que ces deux prédécesseurs. A la fois brutal, froid mais avec ses principes, le vampire-narrateur du récit est une créature qui ne tente pas de dissimuler ce qu’elle est. Pas de regrets quant à sa vie humaine, ni d’auto-apitoiement, il a ainsi tout du tueur parfait.
On apprécie ici l’efficacité de la plume, qui colle à merveille avec ce que le héros laisse entrevoir de sa personnalité. Cinglant, Raphaël est un personnage qui s’assume totalement. Un vrai asocial, qui n’apprécie ni la compagnie des siens, ni celle des êtres humains ou des autres créatures surnaturelles, et préfère faire cavalier seul. Ses maladresses, son côté rebelle en font finalement une créature plus humaine que ceux qu’il pourchasse, que ceux-ci soient humains ou pas.
L’action ne manque par ailleurs pas dans le récit. Combats chorégraphiés, retournement de situation, découvertes écœurantes, l’auteur s’en sort pour le moins bien pour conserver intact l’attention du lecteur, s’attardant davantage sur la structure de son récit et ses rebondissements que sur le décor. Un intérêt fort pour le dynamisme, et quelque part le vivant, quoi de plus naturel pour un vampire âgé de plusieurs siècles ?
Jeanne-A Débats joue avec les codes du mythe du vampire sans forcément tomber dans la surenchère. Car si son personnage principal a besoin d’être invité pour pénétrer dans un lieu donné, elle donne une explication aussi originale que bien pensée à cet état de fait. Créature partagée entre l’éros et le Tanathos, le vampire peut ici perdre tout contrôle face à un trop plein de sang et de violence, éprouvant une sensation proche de l’orgasme. Les vampires se sont par ailleurs regroupés en Cénacles, les rebelles étant pourchassés et détruits. Si le besoin de sang est fort, et permet aux vampires de disposer de capacités surnaturelles (force physique, rapidité, vol, etc.), la prédation ultime reste de se nourrir du sang d’autres vampires, bien plus efficace.
Une utilisation intelligente des codes du genre, un personnage froid qui n’en possède pas moins plus d’humanité que certaines de ses cibles, Métaphysique du vampire est un roman réussi auquel on ne peut en définitive reprocher qu’une chose : celui d’être un peu court. A quand une suite ?
Une petite page du blog de l’auteur
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