Emily Gerard arrive en Transylvanie à la suite de son mari, officier de la cavalerie austro-hongroise. Le couple s’établit dans un premier temps à Sibiu, avant d’être déplacé à Brasov. Se prenant de passion pour les superstitions locales, qu’elle juge en opposition avec la tendance au rationnel qui s’est imposé dans le reste de l’Europe, science oblige, la jeune femme va mettre à profit son temps et aller à la rencontre de ces croyances, qu’elle collecte auprès de ses rencontres sur place et qu’elle classifie. Elle en tirera dans un premier temps un article, «Transylvanian Superstitions», avant de reprendre ce dernier au sein de ce qui reste aujourd’hui son travail le plus connu : The Land Beyond the Forest: Facts, Figures, and Fancies from Transylvania.
The Land Beyond the Forest est un des ouvrages dans lesquels a puisé Bram Stoker lors de la rédaction de son Dracula, comme en atteste les notes de l’auteur irlandais. Il semblerait en effet que la méthode d’exécution des vampires ainsi que l’appartenance de Dracula à la Scholomance lui aient été inspirées par les pages d’Emily Gerard. Si les Editions Otrante avaient déjà proposé quelques extraits choisis il y a quelques années, en bonus de La Vampire de Lamothe-Langon, Les Editions du Castor Astral poussent l’exercice plus en avant en publiant une sélection plus étoffé de passages choisis (et réordonnés) du livre.
Si l’optique abrégée a des côtés frustrants (et intègre quelques renvois à des éléments non conservés pour la présente édition), le résultat est assez réussi dans son ensemble. Certes, l’approche d’Emily Gerard est datée, ne serait-ce que par son regard hautain d’occidentale sur des coutumes d’un autre temps. Mais le fait qu’elle sait aussi se mettre en scène (dans l’introduction, notamment, qui raconte son arrivée à Sibiu), et collecte ses anecdotes auprès de contacts dans la population évite les écueils d’une recension désincarnée des croyances locales. Elle scinde par ailleurs le résultat de ses recherches en fonction des 3 ethnies, roumaines, saxonnes et tziganes.
En ce qui concerne la figure du buveur de sang, plusieurs des passages qui ont été pointés comme source des connaissances ès vampire de Stoker sont au coeur de ce petit ouvrage. À l’image des méthodes de destruction des vampires, que Van Helsing mettra en application, ou de l’existence de la Scholomance, cette école dirigée par le diable dont Dracula aurait été élève.
Un ouvrage relativement bien fait, malgré quelques défauts inhérents à son statut de version abrégée, qui permet de mieux cerner l’approche de l’auteur dans sa manière d’aborder le surnaturel des peuples de Transylvanie.