Le comte Hippolyte, qui vient d’hériter du domaine et de la fortune de son père, rencontre une baronne dont celui-ci s’était défié. Il s’éprend aussitôt de la fille de cette dernière, la troublante Aurélia. Une passion partagée, qui trouve rapidement son chemin devant l’autel de l’Eglise. Mais la baronne, qui décède lors du mariage, cache un sombre passé, qu’Aurélia va finir par confier à son mari. Un secret qui pourrait bien jeter le trouble sur le futur du jeune couple…
Vampirisme.com a beau valider dans son ensemble le propos de la collection Frissons, j’essaie de prendre avec du recul chacun des opus. Le premier tome, qui intégrait le vampire de Polidori, partait bien, même si le texte, s’il est fondateur pour ce qui est de la littérature vampirique, n’est pas franchement écrit dans un style inoubliable. Ce deuxième opus, qui se penche sur des œuvres moins connues (hormis La morte amoureuse, qui clôt le recueil) propose cette fois-ci trois textes d’un autre calibre littéraire.
En effet, la nouvelle de Hoffman, si elle ne met pas en scène un vampire au sens strict du terme, n’en est pas moins un pur plaisir de lecture. Une plume racée, une ambiance qui débute dans un réalisme pur et dur avant de jouer sur le registre de l’hésitation avec le surnaturel. Une nouvelle d’une trentaine de pages que je n’avais pas eu l’occasion de lire à ce jour, ce qui me permet de compléter ma culture à ce niveau. En tout cas, une histoire qui vaut largement le détour et pourrait fort bien vous motiver à plonger dans la bibliographie du baron Hoffmann.
Deuxième texte a être intégré à cette mini-anthologie, le Infernaliana de Charles Nodier. Après sa version théâtrale du roman de Polidori, et la nouvelle Smarra, l’auteur n’en avait en effet pas fini avec le thème des vampires, sur lequel il revient au travers de cet étrange bric-a-brac qui mélange extraits d’ouvrages sur le sujet (la dissertation de Calmet notamment, mais pas que), faits divers et autres anecdotes et nouvelles éparses.
Un ensemble pour le moins hétéroclite qui ne se borne pas au thème du vampire (même si ce dernier revient majoritairement). Les démons, les fantômes et autres créatures infernales se succèdent en effet tout au long des textes du recueil. Le tout servi par la plume de Nodier, un des grands novellistes français du XIXe siècle, qui installe au fil du recueil une ambiance mystérieuse et surnaturelle du plus bel effet. Sans jamais prendre parti dans l’hésitation entre réalité et fiction.
La troisième partie de l’ouvrage, qui est sans doute la plus éloignée du thème du vampire, n’en est pas moins présente dans de nombreuses bibliographies sur le sujet. La Guzla de Prosper Merimée ne traite pas uniquement du thème du vampire, et a surtout pour objectif de plonger le lecteur dans les us et coutumes des Illyriens, un ancien royaume situé sur les rives de l’Adriatique. Amateur de mystifications littéraires, Merimée présente son ouvrage comme la retranscription des récits d’un joueur de Guzla (les aèdes locaux) nommé Hyacinthe Maglanovitch.
L’ensemble se présente comme une succession de textes majoritairement courts, à la limite de l’oralité, qui brossent le portrait des Illyriens, qu’il s’agisse de leur culture, de leur folklore ou de leur relation avec les peuplades environnantes. Ce qui permet à l’auteur de proposer quelques textes à connotations vampiriques plutôt sympathiques. La plume est certes simple, mais le texte coule de lui-même, ce qui permet à l’auteur de ne jamais lasser le lecteur.
L’ouvrage se termine par un grand classique de la littérature vampirique : La morte amoureuse de Gautier. Une nouvelle qu’on ne présente plus, qui compte au rang des classiques de l’auteur du Capitaine Fracasse et du Roman de la momie. Une nouvelle intéressante également en cela qu’elle met en scène un vampire féminin, près de 40 ans avant la Carmilla de Le Fanu, et parce que son auteur en profite pour brosser un portrait d’une religion implacable qui ne souffre aucun manquement.
Les vampires mis en scène ici (à l’exception de la nouvelle d’Hoffmann) sont plus proches du folklore traditionnel que du comte Dracula de Bram Stoker. Il s’agit de revenants en corps, devenus vampires suite à des manquements aux règles (d’enterrement, de morale, etc.). S’ils laissent pour certains des marques sur le cou de leurs victimes, ils épuisent tous ces dernières, les entraînant peu à peu vers leur trépas. L’exorcisme, la décapitation ou la crémation semblent les meilleur moyen d’en venir à bout. A noter également que les vampires dont il est ici question ne se déplacent qu’à la nuit tombée. Pour ce qui est de La morte amoureuse, je vous renvoie à la chronique de la nouvelle en question de Téophile Gautier.
Pour sa deuxième sortie, la collection Frissons poursuit admirablement bien sa lancée, s’intéressant à quatre auteurs qui, au travers de nouvelles ou de recueil de nouvelles, ont contribué à définir peu à peu les marques du mythe du vampire en littérature. Un mythe qui puise ici ses racines dans les folklore d’Europe de l’est mais s’en détache peu à peu, sous la plume des auteurs allemand et français.