Tilly a disparu de sa chambre. Son cri a attiré Albert, qui n’a trouvé que quelques traces sur le parapet. Alors qu’il sort dans le couloir à la recherche d’un indice, il tombe sur la comtesse Godiva. Cette dernière utilise ses pouvoirs pour le séduire, et commence à se déshabiller. Au moment où elle enfonce ses crocs dans sa gorge, le jeune homme comprend avec horreur à qui il a affaire.
La revanche de Vranculas (La cripta insanguinata en version originale) est donc la suite du Vampire des Carpates, et le douzième volet de la série Terror. Les auteurs y continuent leur adaptation libre du roman de Stoker. Albert parvient à retrouver Tilly, et décide de mettre un terme aux exactions du comte et de sa femme. Pour autant, seule la comtesse finira un pieu de frêne enfoncé en plein cœur. Le récit se poursuivra en terre anglaise, suivant en cela le livre de Stoker. Les auteurs reprennent certains passages forts du roman, tels que l’échouage du Déméter, ou la mort de Lucy. De nouveaux personnages font également leur apparition, comme Striker (le Van Helsing de circonstance) et le professeur Andrews, un médecin ami de la famille (calqué sur Seward). Dans le même temps, cette suite est plus chiche en scènes érotiques. Pour autant, les auteurs assurent la cohérence avec la première partie et concluent leur version revisitée de Dracula.
Le dessin est qualitativement dans la droite lignée du précédent volet, mais seul un mois sépare les deux numéros. On retrouve le noir et blanc et les trames du Vampire des Carpates, et l’ambiance très gothique qui se dégageait du premier tome. Les quelques scènes érotiques permettent dans le même temps à Ivo Pavone de s’attarder sur les courbes de ses personnages féminins, qu’il s’agisse de la comtesse Godiva ou de Tilly. La couverture, très cinématographique, est une nouvelle fois due à Lendro Biffi.
Concernant le folklore vampirique, ce deuxième volet prend des libertés avec le premier. Il y a là l’idée que seul un pieu de frêne permet de tuer un buveur de sang, quand un pieu d’or (par exemple) ne fait que l’immobiliser. Il y a aussi cette scène inattendue, où le cercueil du comte traverse la Transylvanie, jusqu’à Vienne. Pour le reste, ce sont des éléments présents dans le livre qui sont exploités. Déjà cette idée que les vampires possèdent un pouvoir de suggestion, grâce auquel ils peuvent prendre l’ascendant sur leurs victimes. Ensuite qu’ils peuvent se transformer en animaux (loup, chauve-souris). Enfin que les signes religieux permettent de les repousser.
Si la chute finale manque de panache (et offre presque l’opportunité d’une suite), ce deuxième opus conclut une adaptation à forte teneur érotique du roman de Bram Stoker. De mon point de vue, l’intérêt réside dans le parallèle qu’on peut faire avec le cinéma fantastique italien de l’époque. Il y a une propension à reprendre la charge gothique de la Hammer en la colorant d’un érotisme plus palpable (que la Hammer commence à intégrer elle-même à cette époque). Il y a par ailleurs cette idée de souligner le sous-texte érotique du vampire, en le déportant au premier plan. Et il y a aussi là enfin une sorte d’acte de naissance de la BD ès vampire européenne, même si le diptyque qui s’achève avec ce deuxième tome n’est pas le premier dans le registre (Zara et Jacula sont déjà passées par là).