Depuis la mort de leur père, un chasseur de loup-garou, Doris et Dan Lee vivent dans la ferme de famille, non loin de la petite ville de Ransylva. Quand Doris se fait mordre par le comte Magnus Lee, le Noble dont le territoire s’étend sur toute la région, elle n’a d’autre choix que de dissimuler sa morsure, et se mettre discrètement à la recherche d’un Chasseur de Vampires. C’est ainsi qu’elle fait la connaissance de D, un dhampir qui accepte de se mettre à son service. Les citadins, qui découvrent bientôt que la jeune femme est la cible du comte, vont rapidement se mettre sur la route du chasseur, de même qu’un petit groupe de malfrats qui écument dans la région.
Vampire Hunter D est une licence incontournable, autant pour qui s’intéresse à la culture japonaise (manga et animation inclus) que pour les aficionados de vampires. En Europe, on connaît essentiellement le personnage par les deux films d’animation (sortis respectivement en 1985 et 2000) et un manga en huit tomes, tirés des romans, le premier film adaptant justement le récit qui fait l’objet de la présente chronique. Car à la racine de cet univers, ce sont près de quarante romans (la série est encore en cours), publiés à partir de 1983, écrits par Hideyuki Kikuchi et illustrés par Yoshitaka Amano (un illustrateur bien connu des joueurs de Final Fantasy, ou pour son travail sur des séries animées comme La Bataille des planètes ou encore Arslan). C’est quoi qu’il en soit un des cycles majeurs (et un des plus anciens) pour ce qui est de la figure du vampire vue par les auteurs japonais, et à ce titre un jalon.
Les remerciements comme la postface nous en apprennent un peu plus sur la source d’inspiration de la série. Car si l’univers mêle western et post-apo (l’histoire se passe 10 000 ans dans le futur, sur une terre ravagée par des conflits nucléaires), elle repose sur des bases gothiques que les auteurs revendiquent, en se plaçant d’emblée sous le patronat du Cauchemar de Dracula de Terence Fischer. Cet apport mis à part, qui voit se matérialiser château imposants, créatures surnaturelles et certaines formes de sorcellerie, Vampire Hunter D partage de nombreux points communs avec Ken le Survivant, dont le manga est sorti à la même époque. Mais par ce recours à un imaginaire qui emprunte beaucoup à la Hammer (et au roman de Stoker, qui est convoqué par petites touches), l’auteur tire son épingle du jeu, proposant une œuvre forte qui n’a pas pris une ride.
Ceux qui connaissent le premier film ne seront pas surpris par l’histoire, qui en est une adaptation assez scrupuleuse. Pour autant, s’agissant de l’histoire d’origine, l’ensemble est une belle réussite qui propose une ambiance assez incroyable, dont D est assurément le rouage central. On suit donc les déboires du personnage de Doris, une jeune femme qui survit depuis la mort de son père, en ayant pris la tête de la cellule familiale qu’elle forme avec Dan, son jeune frère. D’autres protagonistes vont se greffer sur le trio, que ce soit du côté des vampires (le comte Lee, sa fille Larmica), que des humains (le shérif, le docteur qui prend les Lang sous son aile, le maire du village et son fils Greco), voire des antagonistes inattendus. Le récit ne manque pas de rebondissements, et D aura fort à faire pour sauver Doris des griffes de Magnus Lee, qui voit en elle sa future épouse.
En ce qui concerne les vampires, ce premier tome nous détaille de manière assez poussée ce que sont les Nobles, les vampires de la série. Ce sont des buveurs de sang qui vivaient dans l’ombre avant que les humains ne s’entre-tuent, et ont profité du déclin de la société humaine pour prendre plusieurs siècles durant le pouvoir. Pour ce faire, ils ont pu compter sur leurs pouvoirs (qui varient d’un vampire à un autre), ainsi que sur leurs connaissances scientifiques, notamment en robotique. Certains peuvent contrôler la météo, d’autres se transformer en animaux, d’autres possèdent des capacités d’hypnoses avancées. Pour transformer un être humain en vampire, plusieurs morsures successives sont nécessaires. Ils peuvent enfin être tués si on leur enfonce un pieu en plein cœur, et ne semblent pouvoir se déplacer que la nuit venue, sombrant la journée dans une catalepsie qui les oblige à se terrer, à l’abri des hommes. Enfin, si ce sont des créatures versées dans la science, ils ne se délectent pas moins de vivre dans un décorum tout ce qui est de plus médiéval.
Un premier tome de belle facture, rehaussé par les illustrations d’Amano, qui permet de mieux comprendre la genèse de cet univers et d’y mettre un premier pied. Largement de quoi motiver le lecteur à poursuivre sa lecture dans les prochains tomes, dont les récits n’ont pas été portés à l’écran.