Lamarque, Ludovic – Portrait, Pierre. Je suis le sang

Alors qu’une adaptation de Dr Jekyll et Mr Hyde de Stevenson triomphe au Lyceum Theater de Londres, une vague de crimes sauvages secouent l’East End. Des prostituées sont retrouvées assassinées et mutilées, à tel point que la presse s’empare rapidement de l’affaire, alors que Scotland Yard peine à trouver le coupable. Bram Stoker, régisseur du Lyceum et fidèle bras droit d’Henry Irving, le propriétaire des lieux, voit là de quoi trouver matière à l’œuvre fantastique qui lui permettrait de se faire un nom en tant qu’auteur. Jusqu’à ce que sa route croise celle du meurtrier, et qu’un étrange manège se mette en place entre eux.

Après un premier roman remarqué chez Denoël, Ad Noctum, le duo Lamarque et Portrait est de retour avec un roman qui quitte les rivages de la SF pour s’enfoncer dans la période victorienne. Et si d’autres fictions s’étaient déjà penchées sur les liens possibles entre Dracula et l’Éventreur (à commencer par le Anno Dracula de Kim Newman), c’était surtout pour envisager la rencontre entre les deux monstres, et pas imaginer la genèse du roman sous l’influence des meurtres du Ripper.

Les deux auteurs propulsent le lecteur au cœur du Londres de la fin du XIXe siècle, quand la bonne société victorienne frissonnait devant les exactions de l’Éventreur tout en ayant conscience qu’elles ciblaient les bas fonds de Whitechapel. Le curseur est mis sur ce qui a pu influencer Stoker dans son roman, que ce soit au niveau de sa vie personnelle ou de l’Histoire qui se déroule autour de lui. Ils reprennent ainsi des éléments vérifiés (le Naufrage de Whitby, les récits fantastiques de la mère de Stoker, la relation Irving/Stoker) mais imaginent que le romancier a croisé la route du plus célèbre tueur en série de l’époque. C’est donc un vrai travail de passionné, qui donne à réfléchir sur la création littéraire et la position de l’auteur vis-à-vis de son histoire, qui se déroule au fil des pages du roman.

Le style est simple et efficace, l’essentiel se focalisant sur les touches successives qui aboutissent au récit final, depuis les premières ambitions de Stoker jusqu’au choix de sa trame de fond, et la teneur de son personnage central. De rencontres en hasards, de doutes (les auteurs imaginent le romancier irlandais se poser des questions sur les ressemblances et dissemblances de son roman au regard du texte de Le Fanu, et découvrir celui de Von Wachsmann) en éclair d’inspiration, c’est le processus d’écriture de ce qui demeurera à jamais comme le roman de vampire dans lequel on nous propose ici de nous immerger.

Passionnant sur le fond, ce roman à quatre mains est, malgré une part de fiction indéniable, une variation assez passionnante sur la genèse du Dracula de Stoker.

Une réponse à Lamarque, Ludovic – Portrait, Pierre. Je suis le sang

  1. Mauvais Karma dit :

    Après un début un peu lent, la trame se tisse au fil des pages et mêle habilement la réalité et la fiction. Voir le vampire de Stoker se créer (de manière fictionnelle) sous nos yeux est un régal. Le conflit de Stoker aux prises avec le fameux Jack l’éventreur se laisse lire sans fin (qui est malgré tout très bonne).

    Merci à vampirisme.com pour ce cadeau.

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