Alors qu’il venait d’être pendu, John Gravestone a été victime du baiser rouge, mordu par Camilla. Alors que tous le croient mort, son corps tente de supporter les fièvres inhérentes à la situation, grâce aux soins prodigués par son oncle Téophile et son précepteur Tibbett. Les deux hommes savent que s’il survit à cette étape, Camilla n’aura de cesse de lui prodiguer la morsure finale, qui achèverait de faire de lui un vampire. Ils décident donc de partir pour l’Écosse, dans le château de la mère de Gravestone. Là semble résider quelque chose en mesure de les aider à faire face à la situation. Pendant ce temps, Mary est prise de doutes quant à la destinée de son amant. Elle décide donc d’enquêter, et de surveiller les allées et venues de Gravestone Hall.
Jérôme Le Gris et Nicolas Siner poursuivent la geste de John Gravestone, avec cette suite pour le moins réussie. Le duo capitalise sur les éléments de lore établis dans le premier tome (notamment ce qui arrive aux victimes du baiser rouge). Mais ils n’en restent pas là, et vont convoquer dans cette suite directe une autre figure phare du fantastique, souvent opposée au vampire (particulièrement depuis Vampire : La Mascarade, puis la saga Underworld) : le loup-garou. À la manière de ce qui avait été fait dans le premier volet avec la figure du vampire, il y a une vraie tentative de s’approprier le légendaire de la créature, pas juste convoquer les caractéristiques usuelles.
Pour ce qui est de l’histoire, on continue d’être dans la lignée de titres plus anciens, comme Le Prince de la Nuit (notamment dans l’idée de cette famille aux prises avec un vampire), voire Le Troisième Testament (pour l’aspect mythique). L’ambiance début XIXe est très bien rendue, dans une veine gothique qui colle parfaitement à la trame. À ce niveau, le manichéisme apparent du premier tome finit ici d’être mis à mal. Car si c’est bien la vengeance et la promesse qu’a faite Camilla qui la pousse à s’attaquer à John Gravestone, ce qu’elle va déceler chez le jeune homme va remettre en question son ambition première.
Côté dessin, j’aime beaucoup le style de Nicolas Siner. On y retrouve quelque chose d’un Mathieu Lauffray, l’alliance du trait et des couleurs me renvoyant régulièrement à des séries comme Long John Silver. J’aime également la manière dont le dessinateur joue avec le format de ces cases, manière à souligner soit une opposition entre deux protagonistes, soit à souligner le rythme de l’action.
On verra ici par l’exemple ce qui arrive aux victimes du baiser rouge, et les phases qui suivent la morsure. On apprendra également que s’ils sont blessés, les vampires peuvent se régénérer plus facilement (même de blessures graves) à proximité d’artefacts anciens. Enfin, le récit et le discours de Téophile permettent au lecteur de percevoir que tant que Camilla ne transforme pas John, ce dernier devient un chasseur de vampire formidable, insensible aux morsures des autres vampires. Cet opus est également, comme cela a été dit plus haut, l’occasion de réintégrer les loups-garous dans cet univers. Ils y sont présentés comme les grands ennemis des vampires, ce qui n’a pas empêché les exorcistes et chasseurs de s’attaquer également à eux.
Une suite de bonne tenue, qui approfondit l’histoire du premier tome, continue de détailler les figures surnaturelles évoquées et achève la maturation de John Gravestone. Le final montre dans le même temps que ses forces seront également ses faiblesses. Vivement la suite.