Le premier tome de la série Chronique des Stryges, intitulé Lemashtu, d’après le prénom du personnage principal, un « vampire » adolescent, était paru en 2009, c’est-à-dire il y a déjà quelques années tout de même. Le 2e volet entre les mains, je me suis empressée de procéder à une relecture et je crois que c’est une bonne chose – bien qu’éventuellement dispensable – puisque Li-Cam décrit un univers riche quant au monde des stryges, composé de castes et de clans et auquel s’attache un lexique propre. Toutefois, je voudrais rappeler au lecteur qui ne souhaite pas revenir en arrière, qu’il a la possibilité de consulter les fiches relatives à chaque type de stryge insérées dans le premier volet mais aussi, je l’ai découvert un peu tard, en annexe du présent volume.
Lemashtu nous laissait avec un arc des Chroniques des Stryges complètement abouti, bien que dressant plusieurs perspectives quant à la trame générale du cycle, d’une part relatives aux personnages, en particulier le moroï dont l’identité avait été révélée, et Liéga, le seul adolescent stryge que Lem fréquente, mais qui n’est pas un personnage très développé jusque-là. D’autre part, on avait noté la présence d’une dernière fiche relative à une caste appélée « Belzgoï » et dont il n’avait pourtant pas été question dans le premier tome.
D’emblée, le prologue déploie une scène du passé où semble intervenir ledit Belzgoï, mystérieux leader spirituel des Stryges dont la nature, les objectifs et la fonction sont obscurs. Cette énigme est le fil rouge du récit et en inspire le titre. Les faits prennent place non plus en Angleterre mais dans la zone de confinement, plus particulièrement en Roumanie où le voïvode Lemashtu doit être présenté au peuple stryge qu’il est amené à gouverner d’ici quelques années. C’est l’occasion de parsemer le texte de nombreux mots et expressions en roumain, ce que j’ai trouvé superbe. Dans ce nouvel espace géographique, l’univers gagne en ampleur et en richesse, il prend également une dimension politique et sociale, de nouveaux personnages font leur entrée dont enfin une strigoïa (une femme vampire). Ceux que l’on connaît déjà évoluent pour la plupart et principalement, il me semble, Maria, cette dernière expérimentant une montée en puissance des plus satisfaisante. Si dans le premier tome, Maria était le personnage par qui les choses se produisaient, principalement grâce à la passion qu’elle voue aux stryges, malgré sa tendance à être un protagoniste un peu en retrait bien qu’exubérant ; dans ce second volet l’Espagnole fait véritablement son entrée en scène pour le lecteur. Nous avions déjà découvert une partie du fonctionnement de la psychê du voïvode, menacée par l’engloutissement de l’esprit par la folie, à travers Maria nous appréhendons le fascinant univers mental des nékurat.
Il est de coutume dans nos chroniques d’insérer un paragraphe à propos du traitement réservé à la figure du vampire. Est-ce une variation originale ou classique, par exemple ? Quelles sont les capacités de la créature et que craint-elle ? Nous apprenions dans le précédent volume certains éléments sur la genèse du peuple stryge, qui n’est pas « fantastique » mais veut se placer dans un contexte plus « naturel » que « surnaturel » – nous avions vu que le stryge est sur la même brindille de l’évolution que l’homme. La découverte de l’Histoire stryge, de leurs capacités, fait partie du plaisir de cette lecture, il serait donc malvenu d’en parler directement, néanmoins, je peux dire que j’apprécie cette manière de nous livrer un univers stryge (et humain) tout en en démontrant les construits sociaux en jeu. Nous sommes amenés à découvrir un univers de traditions, de croyances et de folklore tandis les mécanismes en sont dévoilés.
Au final l’intérêt de cette série ne fait que croître à mesure que l’univers continue de se développer dans ce deuxième volume se déroulant dans un coin de la Roumanie contemporaine et j’attends impatiemment la suite du destin de Lesmashtu et de ses amis.