De tous les personnages de la littérature fantastique, le vampire est sans doute celui qui domine le plus l’imaginaire contemporain.Son omniprésence dans la littérature, mais aussi dans la bande dessinée, au cinéma, à la télévision, dans les jeux de rôle et même dans la publicité, constitue à elle seule la preuve qu’il exerce une incontestable fascination sur le grand public. Le vampire qui nous est devenu désormais si familier est-il le même que celui qui faisait rêver les romantiques ?
Parmi les grands spécialistes français du vampire, Jean Marigny occupe indubitablement une place prédominante. Professeur d’université, fondateur et ancien directeur du GERF, il a également basé sa thèse sur le vampire dans la littérature anglo-saxonne. C’est suite à sa thèse que lui est d’ailleurs venu l’idée de ce livre. En effet, l’auteur éprouvait de nombreux regrets d’avoir du limiter son propos au domaine anglophone, sans compter que la littérature vampirique s’est depuis 1983 agrémentée de nombreux ouvrages intéressants.
Jean Marigny fait ainsi preuve ici d’une connaissance exhaustive de la littérature vampirique, offrant au passionné de quoi combler sans mal des années de lectures. Des nouvelles obscures parues dans les pulps des années 50 aux romans issus des jeux de rôles Ravenloft et Vampire, sans oublier pléthore de nouvelles, d’auteurs aussi bien français, qu’allemands, russes, etc. Jean Marigny fait preuve d’une passion communicative.
L’ouvrage se divise en deux grandes parties. L’auteur s’attache dans un premier temps à dresser le panorama de la littérature vampirique, passant au crible les genres littéraires où le mythe a été adapté, comme les grands types de vampires mis en scène dans la littérature du XXe siècle. L’approche est détaillée, agrémentée de nombreux extraits et traductions (dont certaines de la main même de Jean Marigny). Chaque genre romanesque abordé par l’auteur, chaque mode de représentation du vampire (psychique, végétal, minéral, voire plus classique) est ainsi disséqué et illustré de moults citations et références, pour la plupart peu connues par chez nous (même si Anne Rice, Stephen King ou Laurell K. Hamilton occupent une place de choix dans l’ouvrage).
La seconde partie, encore plus intéressante, aborde le mythe de manière plus analytique, mettant en vis à vis le vampire avec les thématiques sociales, depuis la place du sang jusqu’aux inévitables confrontations entre bien et le mal, et entre Eros et Thanatos. Jean Marigny offre au lecteur une analyse très poussée du mythe, redéfinissant la place de l’humanité par rapport à cet intérêt séculaire pour les morts-vivants buveurs de sang.
Rédigé par un des plus grands spécialistes du genre, exhaustif autant qu’émaillé d’une foison de citations et extraits, ce livre est un incontournable pour qui s’intéresse aux vampires. Quand j’aurai ajouté que les annexes sont notamment dotées d’une bibliographie d’une cinquantaine de page, vous aurez compris qu’il s’agit là d’un livre dont vous ne regretterez assurément pas l’achat.
Ta chronique fait baver. Mais elle m’inspire aussi quelque dépit, quand on considère que les deux principaux travaux de Jean Marigny, sont très peu accessibles. Sa thèse universitaire se trouve en BU (voire sur E-bay, où la semaine dernière, elle a été adjugée pour plus de 100 €). Quant à la ""suite"" dont il est question ici, il faudra pour l’acquérir, alléger sa bourse de 60 €. Heureusement, les bibliothèque existent !