Pour la première fois dans L’autre Dracula contre l’ordre noir de la Golden Dawn , Tony Mark nous raconte les circonstances de cette terrible malédiction, mais aussi celle qui s’attache désormais aux basques de Jonathan Harker et de sa femme, Mina, laquelle entretient un bien étrange lien avec l’énigmatique comtesse Dolingen de Gratz. Mais le pire tient dans les noirs desseins de la très influente société secrète, The Hermetic Order of the Golden Dawn, prête à tout pour s’octroyer les mystérieux secrets d’immortalité de Dracula au cours d’une fantastique messe noire perpétrée au cœur même de la « Cité des Morts » dans le cimetière londonien de Highgate.
L’autre Dracula était déjà une relecture pour le moins sulfureuse du roman de Stoker, qui détournait l’oeuvre en appuyant fortement le côté sexuel, franchissant la barrière des tabous victoriens et s’essayant à une version pornographique et homosexuelle des aventures de Jonathan Harker, Mina, Lucy… Cette suite, qu’on pourrait envisager plus détachée du matériau de base (car l’auteur avait choisi pour le premier opus de respecter la trame et les grands moments du récit), joue une nouvelle fois avec le Dracula original. On y retrouve ainsi les 4 héros survivants (Jonathan, Mina, Lucy et Arthur) une nouvelle fois alliés au comte vampire. Cette fois-ci, ce n’est pas la défense de ce dernier qu’ils vont devoir prendre, mais bien celle du devenir de l’humanité, face aux ambitions d’un mage de sinistre réputation : Alceister Crowley.
La charge pornographique (tant le récit est direct à ce niveau) est à nouveau dominante, et c’est à nouveau les relations homosexuelles entre les personnages qui sont mises en avant, même si les personnages apparaissent assez contrastés. Jonathan est marié à Mina, de qui il a eu un enfant, mais n’en éprouve pas moins une forte attirance physique pour le genre masculin, à commencer par Arthur et Dracula. Une attirance qui saura cependant lui venir en aide à de nombreuses fois, lui permettant de se trouver des alliés de circonstances. L’aspect sexuel de Dracula est ici fortement appuyé, dans le sens où le personnage apparaît à la fois comme une créature de sexe et de sang, qui prend source autant dans l’hémoglobine que dans le liquide séminal. Si la morsure cristallisait toute la part sexuelle dans le texte de Stoker, elle est ici appuyée par les relations sexuelles des personnages.
Dracula apparaît ici comme une créature immortelle, née de la morsure d’une goule, sur un champ de bataille. Adepte des arts sombres, elle n’en fait pourtant usage qu’avec parcimonie. L’auteur joue également avec le folklore est-européen, mettant en scène la légende qui veut qu’on puisse débusquer un vampire en promenant un jeune homme nu sur un cheval n’ayant pas encore vêlé autour des tombes d’un cimetière. On apprend aussi que même découpé en morceau ou réduit en cendres, il est toujours possible de ressusciter un vampire, en unissant à la fois sexe et sang. Et que le pieu en plein coeur n’est pas suffisant pour détruire totalement un vampire. A noter également que les vampires sont dotés d’une force supérieure aux humains, même s’ils craignent la lumière du soleil.
Une suite cohérente avec le premier opus, qui continue de jouer avec l’oeuvre de Stoker, réinjectant certains passages phares de l’oeuvre (dont son introduction longtemps écartée), et jouant avec des personnages pas exploité jusqu’ici. Reste que l’intrigue est un peu faible, et que sa résolution est un peu facile. Mais l’ensemble fait preuve d’une bonne connaissance de l’oeuvre de Stoker, du mythe du vampire. A réserver à un public averti.