Guinée, en décembre 1974. L’armée portugaise est de plus en plus prise au piège dans le conflit contre l’indépendance de sa colonie. C’est dans ce contexte qu’un commando d’une petite dizaine d’hommes est envoyé en mission secrète, à la frontière avec le Sénégal, pour confirmer les coordonnées d’une base ennemie. Mais les choses ne se dérouleront comme prévu, et c’est une équipe amputée de quelques-uns de ses membres qui va arriver sur place… et se retrouver face à un ennemi inattendu.
Si c’est avec Le prince de l’Ennui que j’ai découvert les Éditions du Long-Bec, je suis rapidement tombé sur l’existence d’un autre titre vampirique à leur catalogue, ce Commando Vampires. Lequel est une traduction d’un album intitulé Os Vampiros (influencé par une composition éponyme de Zeca Afonso, un des grands noms de la chanson portugaise). Des éléments intéressants à avoir en tête quand on comprend que le livre s’articule autour d’une page sombre de l’histoire du pays : les conflits coloniaux qui découlent du refus du régime de Salazar de leur accorder leur indépendance.
Le récit se veut d’emblée immersif : le lecteur fait progressivement connaissance avec le petit groupe au moment où la mission débute. Et si c’est Machado qui finit par s’imposer comme le personnage central, ce n’est pas celui qu’on verra le plus prendre la parole. En bons commandos, ces hommes sont des durs, habitués à l’horreur de la guerre (que ce soit les démonstrations du camp ennemi ou celle qu’ils se croient en devoir de leur opposer). Mais cette fois-ci, ce à quoi ils vont devoir faire face est d’un tout autre registre… et ils n’y sont pas préparés.
Confronter la guerre et les vampires n’a en soi rien de neuf. Plus morts que morts-vivants de Jack Dann et Gardner Dozois est une novella qui ne date pas d’hier, et en BD on peut également penser à des séries comme Batailles (un seul tome traduit en France). Mais l’approche des auteurs tend davantage ici à se rapprocher d’un 30 jours de nuits, avec ce petit groupe qui finit acculé sans vraiment comprendre la teneur de ce qui se passe autour d’eux. C’est bien amené, les personnages sont bien campés, même si parfois à la limite de la caricature.
Pour ce qui est du dessin, je découvre pour l’occasion le toucher de crayon de Juan Cavia. Il y a un penchant réaliste, mais pas trop, dans sa manière de dessiner ses protagonistes qui m’a relativement accroché. Mais c’est la conjonction avec la mise en couleur très réussie qui donne vraiment sa force à la part visuelle de l’album. On parfois est à la limite du dessin-animé, graphiquement parlant, ce qui insuffle un grand dynamisme, depuis les expressions des «héros» jusqu’aux scènes où le mouvement est central. J’ai à cet égard pensé aux premiers tomes de l’adaptation de La Chronique des Immortels, pour ce côté très « animé » du graphisme.
En ce qui concerne les vampires, ils sont nommés comme tels à un moment du récit, dans la bouche même d’un des infectés. S’ils se déplacent la nuit et se nourrissent du sang de leurs victimes, on ne sait pas grand-chose sur leur origine ni sur leurs faiblesses, sinon qu’une balle en pleine tête semble être un moyen létal d’en venir à bout. Ils sont d’une rapidité hors du commun, et d’une force physique impressionnante. Enfin, quand une personne blessée ou mordue par une de ces créatures meurt, c’est pour renaître à son tour en tant que vampire.
Un album très intéressant dans son mix entre fantastique et Histoire, porté par un dessin et une colorisation très réussie.