Janet et Mia sont à la recherche d’un déguisement pour la soirée d’Halloween qui doit avoir lieu à l’Université. Ce faisant, elles pénètrent dans une boutique d’East Harlem où accessoires SM côtoient colifichets de bon marché. C’est à cette occasion que Janet met la main sur une étrange parure, une croix Ankh pourvue de deux minuscules pierres rouges. Elle confie le bijou à Mia, qui se sent d’emblée attirée et l’enfile rapidement à son cou. L’bjet va la conduire à découvrir un pan méconnu de l’Underground New York, et faire la rencontre du mystérieux PhaX. Mais ce dernier joue un jeu étrange, et la jeune femme y a semble-t-il un rôle central.
Lorris Murail n’est pas un nouveau venu dans le monde de la littérature jeunesse. L’auteur a en effet une dizaine de romans à son actif, et un univers partagé avec ses sœurs Elise et Marie-Aude (déjà autrice du Vampire du CDI, un signe ?). Vampyre : La Fille du Bal des Ombres est autant un récit orienté à destination d’un public Young-Adult que son premier livre qui convoque la figure du vampire. Pour autant, le romancier choisit de ne pas s’aventurer du côté des poncifs, et de la romance vampirique popularisée par Twilight. La galerie de personnages comme les lieux de l’intrigue sont relativement resserrés, ce qui n’empêche pas Lorris Murail de doter ces principaux protagonistes (particulièrement Mia, Terry et leur professeur Aurélien Langford) d’une psychologie travaillée. L’ambiance est assez réussie, et reconstitue de manière assez convaincante la scène vampyrique américaine, pour qui connaît un peu cette dernière (et pour ceux qui voudraient en savoir plus, je ne peux que recommander notre interview de Laurent Courau et son documentaire sur le sujet).
En ce qui concerne la figure du vampire, Lorris Murrail l’aborde ici d’une multiplicité de manières. Tout d’abord par la profession du père de Mia, qui est un zoologiste spécialisé sur les chauves-souris. Son envie de retourner sur le terrain l’amène rapidement à quitter le domicile familial, pour aller étudier sur place certaines espèces de chauves-souris vampires. Mais l’essentiel du roman tourne autour des vampyres, cette excroissance à la fois de la scène gothique et du milieu des gangs américains. Mia découvrira plus en avant leur univers en mettant les pieds dans un club qui accueille certains de ceux qui se revendiquent ainsi, entre obsession pour le sang et soif de pouvoir (et de force physique ou psychique). Aurélien, en professeur de littérature particulièrement amateur du XIXe siècle convoquera quant à lui une troisième voie : celle du vampire de fiction. Mais comme on le verra au fil du récit, si ces trois grands ensembles se rattachent à la figure du vampire, ils ne sont pas forcément compatibles. L’animal et le vampyre héritent par mimétisme de la créature issue de l’imaginaire. Le premier en raison de son statut d’hématophage, et par la capacité du vampire de fiction à se transformer en chauve-souris. Le second par son amour de la nuit et son besoin de s’abreuver avant tout d’énergie vitale, mais parfois de sang. Mais le roman voit aussi la fiction s’effacer devant le réel, quitte à jouer sur les origines médicales du surnaturel (la porphyrie).
Si j’imaginais un livre Young-Adult relativement calibré, la lecture de Vampyre : La Fille du Bal des Ombres aura été pour le moins inattendue. Les recherches que Loris Murrail a vraisemblablement menées en prélude à son récit lui permettent de jouer avec les différents aspects du sujet tout en tissant une trame qui ne manque pas d’intérêt. L’ensemble donne lieu à un roman Young-Adult qui tire son épingle du jeu et se démarque de la production habituelle.