Le Japon de 1969 est encore en plein mouvement social étudiant, qui a débuté en octobre 1968. Rei est un adolescent, membre d’une petite section formée avec quelques camarades. Alors qu’il cherche à fuir une manifestation qui dégénère, il assiste à un étrange face à face entre une jeune femme armée d’un sabre et une créature qui ne semble pas tout à fait humaine. Rei est par la suite arrêté par la police, et exclu quelques jours de son établissement. C’est là qu’il est contacté par Gotoda, qui se présente comme un inspecteur qu’on aurait dessaisi de son enquête. Une vague de disparitions mystérieuses secoue l’un des syndicats étudiants, le S. R. Mais la hiérarchie de l’enquêteur ne semble pas disposée à ce que ce dernier mène à bien son investigation. Ayant compris que Rei a assisté à un événement lié à son enquête, Gotoda implique celui-ci et ses amis dans ses recherches. Car la prochaine cible pourrait bien être Aoki, un des membres de leur petit groupe.
On ne présente plus Blood the last Vampire, dont la première itération est l’anime éponyme, qui date de 2000. À l’origine du projet, on trouve Mamoru Oshii et le studio Production I. G. Les light novel dérivés de l’univers sont publiés quelques semaines (en octobre) avant que le métrage d’animation ne voit le jour (sorti en novembre au Japon). Seul le premier tome a été traduit en français, chez Panini Books (Panini Comics ayant édité quelques années plus tard – en 2003 – le manga, qui est une continuité de l’anime). Et si le scénario du manga est une œuvre collective (en fait la jonction de deux projets), Oshii se pose comme une éminence grise de l’univers. C’est donc lui qui est à la manœuvre dans ce premier roman (pour les deux light novel ultérieurs, Junichi Fujisaku – l’un des deux co-créateurs de l’anime – prendra la suite).
Oshii pose un contexte historique légèrement différent de celui de l’anime (qui se déroule en 1966), celui des manifestations étudiantes de 1968-1969. De fait, l’auteur prend son temps pour poser une ambiance crédible, avant de faire basculer la narration. Le personnage de Saya, s’il est important dans le récit, n’intervient au final que peu. L’essentiel de la trame tourne en effet autour de Rei, et de l’enquête dans laquelle lui et ses amis se lancent. Mais c’est aussi un roman où les faux-semblants sont légion. Qui est Gotoda ? Que sont ces créatures auxquelles Saya semble s’attaquer ? Que cache réellement le S. R. ?
L’apport du roman à la mythologie vampirique de Blood est conséquent. On découvre que les créatures – appelées chiropteran dans l’anime, jamais clairement nommées ici – sont une branche parallèle de l’évolution. Au travers d’une discussion entre deux protagonistes importants de l’histoire, les implications multiples de ce lien seront évoquées. De là leur capacité à se faire passer pour des humains : il est vital pour ces entités de se fondre dans la masse, pour pouvoir se nourrir sans attirer l’attention. De là, le roman ouvre une réflexion sur les implications philosophiques, scientifiques et sociétales de l’existence des vampires. L’histoire met aussi en scène le lien de servilité qui existe entre les « vampires » et ceux dont elles se nourrissent. La genèse de Saya est également abordée. Si on sait depuis l’anime qu’elle est une créature hybride, sa naissance est présentée comme le résultat d’une expérience.
Ce premier roman, sorti en parallèle de l’anime original, est assurément un élément important pour comprendre l’univers de Blood the Last Vampire. À ne pas négliger.