La France a eu Gilles de Rais, la Hongrie Erzsébet Bathory. Avec un grand talent d’écrivain, Valentine Penrose fait revivre cette histoire de sang, de mort et de délire. Son livre ne nous fait pas seulement pénétrer dans les sinistres chambres de torture où périrent peut-être plus de six cents jeunes filles. Il ne nous montre pas seulement les malheureuses, nues et torturées. Et nous n’assistons pas seulement à ces hallucinantes scènes de démence au cours desquelles Erzsébet Bathory, aidée par de grimaçantes sorcières tortionnaires, hurle de volupté, tandis que sur ses épaules coule le sang encore chaud de ses jeunes et belles victimes. Valentine Penrose s’est penchée sur ce gouffre qu’est l’âme de son effroyable héroïne, sur cette âme obscure, tragique, possédée.
Cet ouvrage, intitulé, comme c’est souvent le cas sur ce sujet, la comtesse sanglante, propose ainsi une immersion atmosphérique dans l’histoire de la comtesse Bathory. Atmosphérique en effet, car le style qu’emploi l’auteur, davantage lyrique que discursif, donne à l’ensemble une forte tonalité évocatrice que n’ont pas en général les textes historiques.
Penrose détaille ainsi de manière imagée la vie de la comtesse, de son adolescence retirée auprès de sa belle-mère à ses années de veuvage où son goût du sang éclata réellement. Les personnages clés de l’histoire sont également mis en scène, de ses « femmes de mains » qui l’assistèrent durant ses exactions, à ses relations avec la noblesse hongroise, dont sa famille était issue.
L’un des autres points forts de cet ouvrage est de faire le parallèle entre la comtesse et Gille de Rais, qui perpétra en France des exactions équivalentes sur de jeunes enfants. L’ennui qu’ils devaient ressentir tous deux (l’inactivité ne pouvaient que leur peser) à fini par en faire des monstres assoiffés de jeunesse, d’innocence et de sang. On découvre les habitudes de tortionnaires des deux nobles et leur lente descente vers une fin tragique.
Au final un petit livre bien écrit qui permet de découvrir de manière stylée le personnage de la comtesse Bathory, une des figures de proue du vampirisme historique.