David Pirie, critique de films au Time Outlet et admirateur invétéré des errances gothiques, qu’elles soient littéraires ou cinématographiques, examine dans Les vampires du cinéma les archétypes du monstre le plus puissant de l’écran, le Dracula de Bram Stoker, et son avatar féminin, la légendaire comtesse Bathory. Depuis les classiques Nosferatu et Vampyr, jusqu’au surréalisme sexuel des années 70 (le livre date de 1978), l’auteur passe ainsi au crible les différentes étapes qui constituent le parcours des vampires dans le 7e art.
Les livres à se pencher particulièrement sur le mythe du vampire tel qu’il apparaît au cinéma sont de manière surprenante loin d’être légion, et rarement récents. Le livre de David Pirie semble être un des plus complets sortis à ce jour, et est pour le moins connu parmi les amateurs de cinéma de genre. Sur près de 180 pages, l’auteur dissèque l’histoire du cinéma de vampire jusqu’à la fin des années 70. De quoi déjà disposer de pas mal d’éléments sur la manière dont la figure du buveur de sang a évolué au fil des décennies, notamment vis à vis de la censure.
L’ouvrage est introduit par deux chapitres qui font la mise au point sur l’histoire du vampire préalable à son arrivée sur les écrans de cinéma, notamment concernant les personnages historiques que sont Vlad Tepes et la comtesse Bathory.
Le livre est pour le moins complet, ne négligeant ni les classiques du genre, ni des objets filmiques plus obscurs, ce qui donne pas mal d’idées de films à visionner. Reste que l’auteur a une approche très souvent subjective des films, et qu’il ne se prive pas d’égratigner Nosferatu ou Le Bal des vampires, arguant que le premier est surestimé du fait de son statut de premier film identifié sur le sujet, et fait du second un pastiche humoristique qui tombe à plat.
Ces avis pour le moins tranchés n’empêchent pas pour autant de trouver le livre très complet (malgré un examen qui se termine en 1977). L’auteur propose un découpage chronologique déjà bien connu (Universal, la Hammer et ses concurrents anglais, le renouveau du cinéma américain sur le sujet et le cinéma latin), et lui ajoute une partie assez importante sur ce qu’il choisit de nommer « les vampires du sexe ». Une étape qu’il intercale entre la Hammer et le retour en lice des productions américaines, et correspond essentiellement à une époque de plus grande tolérance de la censure, qui offre la possibilité aux réalisateur de quitter quelque peu le giron du sous-entendu et de la métaphore pour afficher clairement la tension sexuelle des films du genre dans la production européenne. On y croise donc essentiellement la filmographie de Jean Rollin, et les derniers films de la Hammer sur le sujet, où la nudité ne se dissimule plus (voire se met en avant).
A noter pour finir que l’ouvrage est abondamment illustré de photos, affiches et matériaux promotionnels, que le maquettiste n’a pas hésité à déployer sur des pages complètes. La qualité d’impression aidant à apprécier ce travail indispensable pour un livre qui traite finalement de l’impact visuel d’une créature fantastique.
Les Vampires du cinéma de David Pirie est donc un quasi-incontournable pour l’amateur de bêtes à crocs. Une base intéressante pour étudier le long cheminement des vampires sur la toile, même si on peut pour autant regretter la subjectivité forte de certains passages, et le manque de profondeur de la réflexion, l’auteur se contentant souvent de rester à la surface des choses, sans par exemple faire le parallèle avec la situation politique contemporaine à la sortie des films étudiés. N’en demeure pas moins que cet ouvrage est autrement plus intéressant au niveau du fond (et de la forme) que celui B. Pattisson.