De nos jours, le vampire est partout, et il devient même l’un des éléments majeurs de la culture populaire mondiale, présent aussi bien dans la musique rock, de variété ou le jazz que dans la comédie musicale, la bande dessinée ou la publicité. Symbole de rébellion et de libération sexuelle, le vampire est un être d’exception qui ne saurait se satisfaire des codes imposés au genre humain. De cimetière en maison hantée, balade en compagnie de Charles Nodier, Lautréamont, Voltaire, Tolstoï, Alexandre Dumas, Charles Baudelaire, Bram Stoker, Guy de Maupassant, Goethe, Sheridan Le Fanu, John Ajvide Lindqvist, Ann Radcliffe, John Polidori et bien d’autres…
L’amateur de la figure du vampire en littérature et au cinéma est forcément tombé, un jour ou l’autre, sur le nom d’Alain Pozzuoli. A la fois parolier, scénariste et écrivain, il est l’un des principaux spécialistes français de Dracula et de son auteur Bram Stoker. Sans compter de nombreuses participations à des anthologies et ouvrages de fond sur le thème du fantastique (et bien sûr du vampire). Avec ce petit ouvrage paru chez Mercure de France, dans une collection dont l’objectif est de revisiter un thème par l’intermédiaire de courts extraits des textes marquants le mettant en scène, il explore d’une manière un peu différente son sujet fétiche.
A travers sa connaissance étendue du sujet (et ses préférences littéraires personnelles concernant le vampire), l’auteur va donc passer au crible un pan assez étendu de la littérature sur le sujet. Des textes de Calmet ou De Plancy, à Brian Stableford et Richard Matheson, en passant par Le Fanu et Nodier, Alain Pozzuoli va analyser tour à tour le thème du vampire, depuis ses prémices dans les comptes rendus et essais du XVIIIe siècle jusqu’à son passage en poésie, puis en prose. Et à ce moment-là, dessiner, au fur et à mesure des extraits choisis, les caractéristiques incontournables du buveur de sang. Sans pour autant négliger de montrer son évolution, le vampire ayant vu son statut fortement évoluer au cours du XXe siècle, et tout particulièrement au cours des 15 – 20 dernières années.
Les choix d’extraits (et d’ouvrages) effectués par Alain Pozzuoli permettent de montrer comment la créature folklorique qu’était jusque-là le vampire a peu à peu pris ses marques dans la littérature, en rentrant par les essais, rapports et dossiers sur les cas de vampirisme sur lesquels beaucoup d’encre à coulé au XVIIIe siècle, pour finir par devenir une figure incontournable de la littérature fantastique. Une créature ayant ses villes fétiches (d’Athènes à Lisbonne en passant par la Nouvelle Orléans et Londres) et répondant à des caractéristiques particulières (il dort dans un cercueil, doit boire du sang pour survivre et craint l’ail et les protections sacrées). Mais une créature qui ne reste pas figée à son état initial, et qui évolue en fonction des époques, se transformant au gré des contextes économiques et politiques. L’auteur puise également des extraits dans le Vampyres de Laurent Courau, ce qui lui permet d’appuyer la place importante prise par la créature dans la société.
On pourrait certes regretter l’absence de textes appartenant au giron Bitlit, dans lequel les vampires ont une place de choix, mais ce petit ouvrage permet malgré tout d’embraser une large part de la production littéraire sur le sujet. Quelques affirmations sujettes à débats (qualifier d’amitié la relation entre Calmet et Voltaire me semble un peu abusif) n’entament pas l’intérêt de l’exercice. Lequel permet de se faire des envies de lectures à tout va, et ne se penche pas que sur des classiques du genre, le tout pour un petit prix.