Après un accident d’avion dont elle est la seule survivante, Vampirella suit une psychothérapie. Pour son médecin, la jeune femme n’est pas qui elle prétend. Pas plus les origines extra-terrestres de la vampire que sa filiation avec Lilith n’a de réalité aux yeux de ce dernier. Pour lui, la patiente Ella Normandy, âgée de 24 ans, est victime de schizophrénie et de trouble de la personnalité. Pour Vampirella, l’enjeu est de comprendre ce qui a bien pu se produire. Progressivement, en passant en revue avec le praticien les semaines qui ont précédé l’accident, la survivante de Drakulon commence à croire qu’elle a pu être la cible d’une attaque concertée.
En 2019, le scénariste Christopher Priest (connu pour avoir travaillé sur des personnages comme Batman, Luke Cage…) se voyait confier une série régulière consacrée à Vampirella. En cela, il prenait donc la suite d’Eric Trautman, de Nancy Collins et de Jeremy Whitley. Seduction of the Innocent. Volume 1 est le premier recueil de cet arc narratif, et regroupe à ce titre les numéros 0 à 6 de cette nouvelle histoire de la vampire extra-terrestre. S’appuyant notamment sur la mise au clair à laquelle avait procédé Nancy Collins, le scénariste intègre les différentes genèses du personnage. Il met également en scène des protagonistes bien connus, tels que Lilith, Nyx, Jezebel the Blood Red Queen of Hearts, Drake ou encore Von Kreist. Du coup, pour un néophyte, prendre en marge la licence via cet opus risque d’être plutôt compliqué.
Pour ceux qui connaissent déjà Vampirella, en revanche, l’approche de Christopher Priest ne manque pas d’intérêt. Allonger un vampire sur le divan est une idée qui ne date pas d’hier (S.P. Somtow et Suzy McKee Charnas sont passés par là), mais c’est une première pour Vampirella. En raison de son histoire pleine de contradictions, c’est également une façon plutôt intelligente de s’approprier en main son univers. Nancy Collins avait déjà réfléchi à sa manière sur la question des multiples origines du personnage, Priest prend donc une nouvelle orientation, tout en conservant pas mal d’idées de ses récents prédécesseurs. Si j’attends de pouvoir relire tout l’arc pour juger du résultat final, je dois néanmoins avouer ne pas être si convaincu que ça pour le moment. Les dialogues manquent de spontanéité, et la trame a des côtés pour le moins chaotique. Certes, on est surtout dans les souvenirs de Vampirella, alors qu’elle se livre à son psychiatre. Mais même mis bout à bout, l’ensemble me paraît beaucoup moins fluide et réussi que ce qu’avait pu faire Nancy Collins. Reste que l’on est pour le moment à la moitié du récit.
En s’allongeant sur le divan, et à travers les échanges qu’elle entretient avec son thérapeute, Vampirella semble confier son envie de vivre normalement – à commencer par entamer une relation amoureuse. Pour autant, les événements la poussent à utiliser ses pouvoirs, et à assumer ce qu’elle est. Bien évidemment, son quotidien est dans le même temps régulièrement envahi par l’alliance qu’elle entretien avec le Vatican, et aux missions qu’elle effectue aux côtés des Six Maries, les membres de la Catholic Exorcism Initiative Office.
Au final, l’élément (à mes yeux) le plus convaincant de cette première partie est sans nul doute le dessin d’Ergün Gündüz. Le dessinateur officie depuis les années 1970 dans la bande dessinée horrifique turque. En langue anglaise, seule la minisérie Taxi Tales était jusque-là traduite. Pour autant, lui avoir proposé de travailler sur Vampirella s’avère être une grande réussite. Son trait fin, ses cadrages et son style graphique très proche de l’animation donnent à l’histoire un dynamisme assez soutenu. Sa mise en couleur est toute aussi efficace.
Dans ce nouvel arc, Vampirella est présentée à la fois comme une extra-terrestre venue de la planète Drakulon et la fille de Lilith. Elle paraît pouvoir se passer la plupart du temps d’ingérer du sang humain, et ne possède pas les limites des vampires terrestres, telles que l’impossibilité de se déplacer en pleine lumière. En revanche, elle est capable de déployer des ailes de chauve-souris pour voler, et est dotée d’une force physique hors du commun.
Une première partie qui vaut plus pour son dessin que pour son scénario. Christopher Priest ne manque pas d’idées, mais les dialogues et une histoire quelque peu fouillie peine pour le moment à me convaincre.