En 1725, les gens de Kisolova, en Hongrie, exigent l’exhumation et l’exécution de Plogojovitz, un villageois mort depuis peu, qu’ils accusent d’être un vampire.
Le philosophe allemand Michaël Ranft, reprenant en 1728 le motif plus ancien de la « mastication des morts dans les tombeaux », analyse les données du rapport officiel de l’administration autrichienne : nous avons là les prémisses de la construction mythologique du vampire, ce « revenant en corps » dont on connaît la fortune…
La dissertation de Michael Ranft fait partie des incontournables de la littérature vampirique, au même titre que celle de Dom Calmet. Philosophe de son état, Ranft va analyser en profondeur les tenants et les aboutissants d’un cas de vampirisme devenu aujourd’hui célèbre pour les aficionados : le cas Peter Plogojowitz. Démontrant par la science de son époque que les « vampires » dont il est question ne sont ni des créatures de dieu ou du diable, Ranft va avancer des explications naturelles et psychologique du mythe des morts qui mâchent. Mais en passant en revue ce qui a conduit les habitants de Kisolova à détruire le corps de Plogojowitz, il va également poser les bases d’une certaine mythologie du vampire, en figeant sur papier les conceptions folkloriques du mythe.
Pas encore buveur de sang, les vampires dont il est question ici sont des morts qui reviennent hanter leurs proches encore vivants, absorbant leur force vitale jusqu’à les conduire à la mort. Le folklore en fait des êtres damnés qu’on peut notamment identifier à la non-corruption de leur corps, voire à la présence de sang dans leur bouche. Pour les mettre définitivement hors d’état de nuire, l’empalement et la crémation du corps s’avère la seule alternative possible.
A l’image de Dom Augustin Calmet, Ranft s’attache ici à démonter les conceptions surnaturelles du mythe, se basant sur les conceptions médicales et psychologiques de son temps. Mais sans s’en rendre compte, il pose également les bases du mythe, en se faisant le porte-parole de pratiques et croyances folkloriques.