Quand Lestat, vampire impie, libertin et suicidaire, s’improvise chanteur de rock pour hurler à la face de l’humanité sa condition de mort-vivant, les mortels lui font un triomphe, sans imaginer une seconde qu’il leur dit la vérité. Mais, parce qu’il a révélé au grand jour leurs secrets les mieux gardés, Lestat est désormais considéré comme un traître par les vampires. D’autant que soudain, et dans le monde entier, une force mystérieuse semble s’acharner à détruire les siens. Avec sa musique à réveiller les morts, Lestat a pris le risque d’arracher à son sommeil millénaire la Mère, la Reine des Damnés, leur ancêtre à tous mais, surtout, peut-être a-t-il convoqué pour un ultime affrontement d’autres créatures plus anciennes et terrifiantes encore ? Serait-il possible que la survie de l’humanité soit entre les mains d’une poignée de vampires ? Une seule chose est sûre, la Reine des Damnés est parmi nous, décidée à régner de nouveau sur les mortels…
La Reine des Damnés est le récit qui permet à Anne Rice d’enrichir son univers, de le faire gagner en cohérence en ouvrant à ses personnages fétiches de nouvelles perspectives. Troisième volume des Chroniques des vampires, ce roman recycle la formule ayant fait le succès des deux précédents tomes en incluant la trame d’une intrigue de grande envergure avec de nombreux protagonistes vampires et humains impliqués par le réveil d’Akasha.
Akasha, reine des Damnés et source essentielle de tous les vampires, tient bien sûr un rôle prépondérant. On découvre ainsi de quelle façon cette souveraine Egyptienne a attiré sur elle et son époux les affres d’une malédiction éternelle. On retrouve également les vampires bien connus que sont Lestat, Gabrielle, Louis, Armand ou encore Marius. Néanmoins, ce sont les deux jumelles rousses porteuses d’une mystérieuse prophétie qui se révèlent cette fois-ci le pilier du roman. Tandis que l’histoire de Mekare et Maharet nous est révélée progressivement, l’auteure fait la lumière par la même occasion sur les origines des tous premiers immortels.
Récit qui ne laisse aucune place à la redondance, La Reine des Damnés apporte son lot de révélations et répond à nombre de questions laissées jusqu’alors en suspend. Parmi les nouveaux éléments qui entrent en scène, on notera la très érudite et secrète société Talamasca ainsi que l’existence de la tentaculaire Grande Famille… L’éveil d’Akasha est l’opportunité pour Anne Rice d’introduire des personnages inédits, destinés à prendre une importance certaine par la suite. Jesse Reeves, David Talbot et Pandora font leur première apparition aux côtés de vampires très anciens tels que le vénérable Khayman, l’un des Premiers Sang.
Le fil de l’aventure parvient à tenir le lecteur en haleine en adoptant le point de vu de différents intervenants. L’ultime concert donné par Lestat est placé sous de sombres augures. Beaucoup de vampires récents désirent le châtier pour avoir eu l’audace de révéler leur existence à la face du monde, mais Akasha semble veiller sur lui. Quel rôle réserve-t-elle à son protégé ? Selon quels critères la mère de tous les buveurs de sang extermine-t-elle certains de ses descendants et en épargne-t-elle d’autres ? Des vampires, toujours plus puissants vont sortir de l’ombre pour s’opposer à ses dessins présages de malheur.
Les lecteurs qui découvriront les Chroniques des Vampires en commençant par ce tome ne seront pas complètement perdus car le roman prend le soin de faire un résumé des opus précédents. Le Talamasca apparaît comme une organisation aussi impénétrable que fascinante. Jessica Reeves est l’un de ses membres, mais se trouve également être la pupille de Maharet qui veille sur sa famille depuis des millénaires. La jeune femme, attirée par le concert de Lestat, va ainsi pénétrer dans le monde obscur des vampires tout en faisant le lien avec le Talamasca et sa famille hors du commun.
Tandis que les vampires les plus puissants se rassemblent autour de Maharet, Lestat va tenter de raisonner Akasha pour lui éviter de commettre un génocide. Le héros rebelle et désinvolte doit plaider la cause du genre humain, bien qu’il ait conscience que la tâche se situe au-dessus de sa verve habituelle. Le roman de La Reine des Damnés n’est pas comparable au film. Le récit papier se veut plus riche et intelligent. De nombreux thèmes absents de la version cinéma sont explorés ici, et cherchent à interpeler le lecteur. L’histoire prend toute son ampleur lorsqu’on découvre par les yeux des divers personnages, par le biais de leurs tranches de vie, les impressions et craintes qui les animent.
La Reine des Damnés est un livre à côté duquel il serait dommage de passer. Pour comprendre l’origine du mythe vampirique selon Anne Rice, et simplement pour savourer un roman remarquable. Le ton poétique, voir mélancolique, qui imprégnait les deux premières parties se voit dilué ; la présence d’une importante galerie de personnages peut également perdre par moments ceux qui appréhendent l’univers de Lestat et ses compagnons avec cet ouvrage. Mais le troisième opus des Chroniques des vampires – où se joue rien de moins que l’avenir du monde – n’en reste pas moins un réel plaisir de lecture. À découvrir ou à relire sans restriction.