Las Vegas, années 1970 ; une série de disparitions et de meurtres étranges commence à poser problème à la police locale. Rapidement le journaliste Carl Kolchak se met sur l’affaire, suspectant l’origine vampirique des morts vidés de leur sang et des vols de stocks de sang dans les hôpitaux. S’étant largement documenté sur la question vampirique, il décide de proposer ses services à la police, qui finit par débusquer la créature surnaturelle dans son repaire, une maison de banlieue anonyme.
Ladite créature, Janos Skorzeny, s’avère être un ressortissant roumain de plus de 70 ans, qui fit des exactions à Londres puis au Canada, utilisant des faux papiers jusqu’à son parcours final dans le Nevada. C’est un vampire aux crocs démesurés (mais qui ne se révèlent que lorsqu’il attaque ou est en proie à la peur), à l’haleine pestilentielle et au teint blafard, qui ne sort que la nuit en utilisant des véhicules volés ou achetés cash.
Cet homme de haute taille est très maigre, mais doté d’une force prodigieuse, capable de se débarrasser de plusieurs assaillants d’un seul mouvement d’épaule, et sur lequel les balles n’ont aucun effet. Il peut également courir très vite, ce qui lui permet à plusieurs reprises d’échapper à la poursuite policière. La seule arme efficace est l’eau bénite, répandue au fond du cercueil qu’il a emporté de chez lui, après l’avoir vidé de la couche de terre natale qui en tapissait le fond. Les crucifix et l’eau bénite agissent comme un acide et brûlent sa peau, qui sécrète alors un liquide verdâtre, avant de lui enfoncer un épieu dans le cœur. Une solution envisagée est celle de la décapitation, sans être mise en œuvre en l’occurrence.
L’écriture de Jeff Rice est serrée, dynamique et diablement efficace, presqu’uniquement factuelle. Les producteurs télévisuels ne s’y trompèrent pas, puisqu’avant la sortie du roman deux téléfilms-pilote célèbres, intitulé Kolchak : the Night Stalker et Kolchak: The Night Strangler furent produits en adaptant le roman en 1972. Une série télévisuelle du même nom (Dossiers brûlants en France), qui ne connut qu’une saison, fut diffusée en 1974-75, l’année suivant la publication du roman. Celle-ci relate des enquêtes de ce même journaliste sur des affaires relevant souvent du fantastique ou de la science-fiction. Cette série, dont les premiers scripts furent écrits par Richard Matheson, autre figure du genre fantastique, est connue pour être l’une des inspirations premières de Chris Carter, créateur du monument télévisuel The X-Files (Aux frontières du réel en version française).
Darren Mc Gavin, qui joua Kolchak dans la série originale, apparut dans le show de Carter comme une sorte de père spirituel du Département des affaires non classées du FBI. Une nouvelle série, produite par Frank Spotnitz, ancien de X-Files, vit le jour en 2005 avec Stuart Townsend dans le rôle-titre : Kolchak: Le Guetteur (Nightstalker en VO). La série ne connut que dix épisodes à cause de la faible audience. Un comic book vit également le jour en 2003 ; le même éditeur sortit deux recueils de nouvelles dans le même univers, écrites par différents auteurs, dont P. N. Elrod et Christopher Golden.
Un passage relate les recherches de Kolchak sur l’histoire des vampires, et comporte des mentions sur certaines figures vampiriques : le Dracula de Stoker, mais aussi Vlad Dracul, le voïvode de Roumanie du Xvème siècle, John George Haigh, Fritz Harmann, qui sévit à Hanovre, le Vampire de Dusseldorf, le sergent Bertrand qui dévorait des cadavres dans le Paris des années 1848, jusqu’à l’affaire Sharon Tate. Malgré la brièveté de ces mentions, elles sont très bien relatées. On peut donc affirmer que ce roman, pourtant méconnu, est une étape importante dans la production du genre non seulement vampirique, mais aussi fantastique.
Anecdote amusante, sur l’édition française de la collection « Super noire », chez Gallimard (première édition française en 1975), on trouve en quatrième de couverture une publicité pour… un parfum. Pour le plaisir, voici l’argumentaire : « L’homme qui porte BALAFRE. Quand elles le croisent, les femmes devinent tout de suite… Il a choisi la virilité sans concession. Ni archange, ni démon, il porte Balafre tout simplement. Balafre brun au parfum tabac épicé. Balafre vert au parfum frais boisé. Balafre ! Lancôme pour hommes. » En visuel noir et blanc, un coffret du parfum, à côté d’un poignard dressé, puis un homme en costume portant une cicatrice sur la joue…