Une jeune femme un peu naïve se laisse convaincre par son petit-ami Justin de son potentiel d’actrice pour le cinéma pornographique. D’autant qu’on lui promet qu’il s’agira de quelque chose d’assez soft, uniquement en compagnie de Justin. Rapidement, la situation tourne court et quatre hommes font leur apparition sur le plateau, alors que son petit ami s’éclipse discrètement. En passe d’être violée, la jeune femme est sauvée par une étrange jeune femme, armée de katana.
Si je connais l’existence de la série depuis ses débuts, ce sixième opus (qui se penche sur le berceau des vampires) est mon premier contact direct avec Doggy Bags. L’univers s’impose d’emblée comme très influencé par le grindhouse, et une esthétique qui n’a rien à envier aux films de Tarantino et Rodriguez. Sans que je puisse juger de ce qu’il en est vis à vis des opus précédents (tous indépendants), il faut également noter que ce 6e tome s’oriente fortement autour de l’industrie du porno, ce qui n’a en soi rien de surprenant, avec la présence de Céline Tran (ex Katsuni) au scénario (une première pour la série, sur laquelle Run joue habituellement les cavaliers seuls, de ce que j’ai pu constater). De fait, on se retrouve plongé dans une ambiance gore et sexy assez appuyée, sans pour autant que l’histoire ait à en pâtir. Car même s’il y a quelques facilités au niveau de l’intrigue (notamment un évident côté Kill Bill au personnage principal), l’ensemble se tient bien et ne souffre pas de temps morts.
Le livre ne se limite en outre pas uniquement à sa partie BD, en faisant un objet à part entière capable de tisser progressivement son univers En effet, l’album contient une poignée de textes présentant la mythologie sur laquelle s’appuie l’album. C’est d’ailleurs à ce niveau que Céline Tran semble le plus intervenir, signant les articles en question, qui se penchent successivement sur l’écart séparant le vampire de fiction et les créatures ici mises en scènes, explorant également les liens entre le thème du vampire et la pornographie.
Trois dessinateurs au style « école Ankama » se succèdent donc autour des trois récits que compte l’album. Des dessins très comics US de Jérémie Gasparutto et Florent Madoux (associé à une mise en couleur typique de la série qui confère à l’ensemble une part de son originalité et de son ambiance), on passe ainsi au trait plus indé de Guillaume Singelin, qui renvoie autant à l’ambiance graphique de la collection poisson pilote qu’à certains auteurs de comics indé US, avec ses personnages aux coups de crayons acérés moins réaliste mais tout aussi dynamiques.
Les vampires ici mis en scène se sont eux-même baptisés Sépulkres. Particulièrement actif dans le milieu de la pornographie, ils aiment ainsi s’abreuver du sang des victimes féminines qui leur tombent sous les crocs. S’ils craignent le religieux, l’ail, le soleil et d’autres éléments communs avec le vampire de littérature et de cinéma, c’est bien souvent pour des raisons un peu différente que ce qu’on en sait, et dans une mesure parfois moindre. Mais ils peuvent toujours être tués si on leur enfonce quelque chose en plein cœur, où si on leur tranche la gorge, finissant alors par disparaître en fumée. Faire boire leur sang à une de leur victime est enfin un moyen de faire de celle-ci un nouveau sépulkre.
Doggy Bags tome 6 est au final une assez bonne surprise. Si l’histoire n’évite pas certains poncifs (et des références un peu trop évidentes), la mythologie mise en place n’en reste pas moins intéressante, et l’exploration du monde de la pornographie sous l’angle vampirique est assez bien vu, donnant lieu à des mises en scène osées mais réussies.