Bram Stoker l’a dépeint comme une créature des ténèbres assoiffée de sang, sans cœur et sans âme. La vérité est bien différente. Loin d’être un monstre, Dracula est une figure héroïque, protégeant depuis des siècles ses terres et son peuple de la barbarie des envahisseurs. Les véritables monstres, ce sont ceux qui le traquent, ceux qui préfèrent tuer plutôt que chercher à comprendre, ces chasseurs de vampires, tellement aveuglés par leur fanatisme, qu’ils sont incapables de voir l’amour qui unit le comte et Mina Harker… Une passion dévorante qui va rendre Dracula encore plus redoutable que ne l’imaginent ses ennemis…
Premier roman de toute use série consacré à l’un des personnages clés du mythe du vampire occidental, ce roman de Fred Saberhagen est une très intéressante relecture du roman de Bram Stoker. En effet, cette-fois-ci l’histoire est racontée de la bouche même de Dracula. C’est pour lui l’occasion de remettre les pendules à l’heure, d’insiter sur la bêtise crasse du professeur Van Hellsing, aussi monstrueux dans sa croisade destructrice que ne peut l’être le comte avec ses victimes. Original et bien écrit, ce roman est également le point de départ de tout un cycle que consacré l’auteur au personnage de de Dracula.
La description des pouvoirs et états vampiriques que fait Dracula met en parallèle les superstitions et magies que lui a prêté Stocker dans son roman avec les réalités d’une condition vampirique propre à l’oeuvre de Saberhagen. Le goût du sang est toujours au coeur même du récit, Saberhagen n’oubliant pas de remettre au goût du jour certaine scènes-clés du roman de Stoker (dont la scène du rasoir dans la chambre du château). Dracula fait un sort au pouvoir repulsif du crucifix sur le vampire, seul l’ail et les hosties semblant avoir un quelconque effet sur lui, de même que le soleil.
Mais l’intérêt réel de cet ouvrage demeure le travail de réorientation du roman original à travers les yeux de celui qui n’y apparaît à l’origine qu’à travers le récit des différents protagonistes. Ici, Dracula se plaît à citer dans le texte ses anciens ennemis pour mieux mettre en évidence leur obscurantisme. Un immanquable pour les connaisseurs de l’oeuvre de Bram Stoker.