Alors que Napoléon est à quelques jours de son couronnement, des cadavres sont retrouvés comme dévorés par une bête sauvage. Jean-Pierre Séverin, alias Gâteloup, comprend rapidement que le surnaturel est à l’oeuvre, et qu’un vieil ennemi pourrait refaire surface. C’est alors qu’il fait la connaissance d’un exorciste qui est arrivé à Paris dans la délégation du pape. Un homme qui porte un nom à l’historique très lourd : Karnstein. Ensemble, ils vont tenter de débusquer les ennemis de l’ordre, et mettre un terme à leurs agissements.
Pour quelqu’un qui vient de relire les romans de Paul Féval mettant en scène des vampires, voilà une sortie qui tombait à point nommé. En effet, le roman de Schildiner, sorti en VO en 2017, se présente comme une suite de La Vampire (et donc un troisième opus des Drames de la Mort). On y retrouve donc Jean-Pierre Séverin, toujours directeur de la morgue de Paris, qui va se retrouver confronté une nouvelle fois à une manifestation du surnaturel.
L’auteur connaît bien les romans d’origines : il y est fait de nombreuses fois allusion, ce qui assois l’appartenance de cette suite au diptyque original. Mais il ne se limite pas à ces éléments, et déploie un background plus étoffé pour Séverin, tout en poursuivant dans la direction d’origine de Féval : mélanger le romanesque avec l’historique. Une fois de plus, le héros se retrouve donc à agir dans l’ombre de l’histoire, prenant notamment part à l’insurrection royaliste du 13 Vendémiaire, aux côtés du futur empereur.
Mais la trame présentée sur la 4e de couverture n’est pas la seule dans le roman. En effet, les chapitres qui se déroulent en 1805 s’intercalent avec des chapitres qui eux se passent en 1795, soit dix ans auparavant. Ce décalage temporel, associé à la présence des mêmes protagonistes, rend les premiers chapitres parfois complexes à suivre, surtout en raison des différences concernant Napoléon, simple général en 1795, qui est en passe d’être consacré empereur en 1805. Mais il s’agit aussi d’une forme d’hommage à Féval, pour qui le récit enchâssé semble avoir été une technique littéraire incontournable (il y fait appel dans ses trois romans vampiriques). Et ce parallèle permet justement de revenir à la première rencontre entre le héros et sa Némésis (et d’expliquer le ressentiment de ce dernier pour Sévérin et pour Napoléon).
Côté vampire, on découvre relativement rapidement que ce dernier est LE grand méchant du récit. Schildiner fait allusion aux précédentes rencontres de Séverin avec des créatures de la nuit, en mentionnant plusieurs fois à la comtesse Marcian Gregory. Mais il pose surtout le personnage de Saint-Evremonde, un noble né sous Philippe Le Bel qui a été transformé alors qu’il était attaqué par des ennemis. Ce personnage n’a pas été mordu : il a passé un pacte avec une entité antédiluvienne. Depuis, il est immortel, peut influencer (dans une certaine mesure) les esprit faibles et possède les connaissances nécessaires pour engendrer des loups-garous. Enfin, il se nourrit de sang, et est sensible aux artefacts religieux.
Un ouvrage relativement bien ficelé, très roman populaire à l’ancienne dans son approche (notamment par l’utilisation des techniques chères à Féval), tout en modernisant quelque peu l’approche du vampire (bien plus en phase avec ce que la créature est depuis Bram Stoker que ce qu’en avait fait l’auteur du Bossu). Néanmoins, j’ajouterais un bémol concernant la relecture du roman. Si la traduction est fluide, une relecture avant publication n’aurait pas été de trop, tant le roman est plombé par des coquilles.