Sirgent, Jacques. Le livre des vampires

Non-mort et non-vivant, immortel, nécromancien, maîtres des éléments dévastateurs et des créatures inférieures, capable d’apparaître et de disparaître à sa guise, assoiffé de sang humain, invisible dans les miroirs, allergique à tout lieu saint et à tout objet sacré, le vampire concentre tant de fantasmes, tabous et phobies qu’il est bien un prince des ténèbres, un surhomme maudit qui ne cesse depuis l’Antiquité d’alimenter mythes et fictions, tout en conservant un inexplicable pouvoir de fascination et d’admiration – mais est-ce vraiment contradictoire ?

Depuis le début du raz-de-marée Twilight, on voit surgir un peu partout des essais et ouvrages de fond sur les vampires, que ce soit des rééditions ou de nouvelles parutions. Jacques Sirgent, directeur et fondateur du « Musée des vampires » (et auteur des Voleurs d’âmes chez l’Anomalie) sort notamment son premier ouvrage de fond sur le mythe du vampire, publié chez Camion Noir. Force est de constater que l’ouvrage creuse le sujet dans des directions différentes de la plupart des sorties équivalentes, en allant au-delà des repères historiques habituels.

Tout ça est assez bien documenté, parsemé de choses intéressantes mais (car il y a un gros mais) l’ensemble pêche beaucoup trop par le style chaotique utilisé, l’auteur changeant de période historique, de sujet ou de point de vue de manière trop régulière à mon sens. L’effet qui en résulte est une certaine difficulté du lecteur de se plonger de manière approfondie sur la somme de connaissance sur le sujet que constitue l’ouvrage, incapable de suivre de manière efficace le fil du texte. Cela peut certes être vu comme un effet de style, mais il ne m’a pas convaincu.

Jacques Sirgent ne se cantonne pas ici à aborder le vampire sous l’angle popularisé par Bram Stoker. Il remonte en effet beaucoup plus loin, aux croyances primitives comme aux épidémies vampiriques du 17e-18e, rendues célèbres de nos jours grâce aux textes (notamment) de Ranft ou Calmet. L’auteur analyse par ailleurs la place du sang dans les cultures où le mythe a laissé des traces, abordant le sujet de manière autant religieuse que sociologique. L’ouvrage possède également une partie sur Stoker et son Dracula (qui commence par établir des repère bibliographiques sur Stoker et le contexte de l’ouvrage mais introduit de nombreuses idées intéressantes quant à l’écriture du roman), et une dernière partie sur les conceptions modernes du vampire qui souffre d’un trop grand côté « anecdotes personnelles » (liées notamment à son roman) qui jure un peu avec ce qui précède. Jacques Sirgent propose par contre un intéressant parallèle entre Dracula et Jack l’éventreur, notamment via la mise en parallèle des deux personnages via leur contexte historique.

Un ouvrage en définitive alourdi par une structuration des idées par trop chaotique. Ce qui est vraiment dommage car certains points de vue, idées et théories, que ce soit sur la manière dont s’est constitué le mythe ou ce qui a aboutit à la rédaction de Dracula sont franchement intéressants. D’où une note somme toute médiocre.

8 réponses à Sirgent, Jacques. Le livre des vampires

  1. j.burke dit :

    Bonjour. Je ne suis pas d’accord avec vous concernant la partie du Livre des Vampires consacré au Dracula de Stoker. L’auteur est, le premier, à ma connaissance à remonter aussi loin dans les sources d’inspiration ( y compris celles sur jack l’éventreur ) et surtout le seul ( si vous avez d’autres titres à me donner ) à indiquer très précisément pourquoi l’action du livre ne pouvait pas ne pas se dérouler en Angleterre.

    Pour ce qui est l’aspect "chaotique", le moyen âge l’était aussi, et ce parti pris stylistique ne nuit pas trop à l’ensemble car il reflète bien les contradictions diverses et variées qui ont accompagné l’évolution du mythe du vampire à travers l’histoire.

  2. Camille dit :

    Il est vrai que la partie sur le vampire "historique" aurait pu être subdivisée mais cela aurait rendu la lecture plus pratique, pas plus claire mais dans l’ensemble cela ne nuit en rien au plaisir de la lecture et à l’appréciation globale de l’ouvrage. La partie sur Bram Stoker explore bien des aspects de l’œuvre qui n’avaient jusqu’alors, jamais été étudiés.

  3. Vladkergan dit :

    Content de voir que la chronique de cet ouvrage suscite autant de commentaires !

    J’ai légèrement remanié la phrase où j’explique la manière dont est abordé la partie sur Bram Stoker, car elle a (a priori) mal été comprise. Je ne voulait pas dire que rien n’est original dans cette partie, mais bien que les repères bibliographiques qui l’introduisent ont déjà été vus dans pas mal de textes sur le sujet. Ce qui n’enlève en rien à l’intérêt des thèses que passe en revenue Jacques Sirgent, que ce soit au niveau de la figure de Jack l’éventreur (chose qui n’avait en effet pas été dite, à ma connaissance, jusqu’à aujourd’hui) et sur tout ce qui a pu inspirer Stoker au niveau de son contexte historique, allant bien plus loin que la propre histoire de Bram Stoker.

    Concernant le texte de l’ouvrage, qui est l’élément sur lequel j’ai buté à la lecture, je reste persuadé qu’un tantinet plus de linéarité aurait été appréciable, car j’ai personnellement eu beaucoup de mal à rentrer dans certains parties du texte (notamment la première).

  4. Asmodée dit :

    J’avoue pour ma part avoir placé pas mal d’espoir dans ce livre qui au final, m’a plutôt déçu. Comme il est dit dans la chronique principale, le contenu recèle quelques pistes pertinentes sur le sujet vampirique et fait preuve d’une documentation touffue. Hélas, c’est l’aspect convivial qui fait cruellement défaut au texte en lui-même. Le ton imposé laisse transparaître la passion tangible qui anime l’auteur, mais le développement des diverses théories abordées aurait mérité d’être valorisé par une structuration narrative moins confuse, voir moins éparpillé. L’enchaînement des idées et des sujets, appuyé par nombre de références, rend la lecture fastidieuse à cause de cette fameuse carence en matière de clarté. C’est dommage car l’exhaustivité des anecdotes qui sont distillées se révèle plaisante pour peu que l’on parvienne à s’accommoder de ce rythme décousu qui fuse parfois dans tous les sens.

    Pour ce qui est de l’originalité des voies empruntées qui remontent aux sources du mythe vampirique et de sa symbolique, cette dernière est indéniable. Le problème est que cet essai ambitieux dans le fond s’adresse à un lectorat fervent amateur de vampirisme, et seulement à lui. Et encore, le pari de séduire les passionnés n’est pas gagnée. Même si Le livre des vampires évoque des époques lointaines et se démarque de la concurrence grâce à sa seconde partie dédiée à Stoker et son œuvre fétiche, le titre joue dans un registre qui comporte déjà des ténors du genre. Des auteurs chevronnés tels que Jean Marigny, Estelle Valls de Gomis ou Danièle Vazeille ont su arpenter avec succès ce terrain de façon fructueuse, pour ne pas dire attractive, et proposent des ouvrages mieux élaborés pour un prix plus raisonnable, – 32€ pour une édition de ce format des plus dépouillées se révèle au final assez onéreux malgré les pages centrales en noir et blanc gracieusement offertes.

    Un public curieux mais occasionnel aura quant à lui du mal à adhérer à ce livre dont le talon d’Achille tient surtout en sa faiblesse ludique, enclin au rébarbatif. Une accessibilité moindre au plus grand nombre n’est pas au rendez-vous, d’où mon manque d’enthousiasme . Je ne suis pas un lecteur particulièrement exigeant en règle générale, cet avis négatif a été soupesé avec d’autant plus de soin.

    Une fois ces quelques réserves exprimées, il faut avouer que ce livre élitiste pour de mauvaises raisons a néanmoins sa place dans une bibliothèque vampirique qui se veut complète. Les collectionneurs minutieux tout comme les accros inconditionnels à l’univers des buveurs de sang sauront passer outre les défauts soulignés et parviendrons peut-être même à lui trouver un charme certain.

  5. Senhal dit :

    Bonsoir à j.burke/Camille/Clarimonde/bertrand/Paule,

    vous conviendrez que les vampires apprécient peu les croix et adressent à la maxime « tendez l’autre joue » une moue dentue et surtout dubitative.

    En clair, nous sommes forcés de réagir : merci de cesser d’intervenir, ou n’utilisez qu’un unique pseudonyme (le reste des commentaires n’a pas été publié en ligne et ne le sera pas), nous ne goûtons guère ce genre d’artifice, ici ce n’est pas Amazon. Ici, c’est un blog tentant de donner à ses lecteurs des avis francs…

    Senhal, face-cachée-qui-mord de vampirisme.com

  6. Cyroul dit :

    Yeah, Senhal ! A bas les commentateurs masqués !

    PS: pour ceux qui n’auraient pas suivis, j.burke/Camille/Clarimonde/bertrand/Paule sont des pseudos appartenant à la même personne qui multiplie les commentaires essayant de défendre ce bouquin. Manque de bol, la technologie a évolué depuis 1995 et on arrive maintenant sans peine à identifier les petits tricheurs qui essaient de se faire mousser. He he.

  7. Bertrand David dit :

    Salut,

    J’existe bien et est apprécié le livre des vampires de chez camion noir.

    A bientot

    Bertrand David

  8. barnabé dit :

    Je suis un passionné du mythe vampirique. J’avais eu l’occasion il y a deux ans de visiter le Père Lachaise avec pour guide Jacques Sirgent. J’ai acheté il y a un mois son livre à la Fnac Forum au rayon ésotérisme – le mieux fournit de Paris – J’ai été impressionné par ce livre et si je peux comprendre que l’on puisse le critiquer, je reste impressionné par la somme de connaissances contenu dans ce livre. Pour autant je ne considère pas cet ouvrage élitiste mais de très grande qualité s’adressant à tous. Trop de livres sur la question sur ce sujet sont paru en ayant qu’un objectif commercial. Ce n’est pas le cas du livre de Jacques Sirgent dont j’attends avec impatience la traduction de Dracula. J’ai particulièrement été impressionné par le chapitre Bram Stoker EST Dracula.

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