Sous-titré « Déités disparues et esthètes immoraux », Le Cabaret Vert est un recueil de dix-huit nouvelles fantastiques empreintes de vampirisme, de mythologie et de décadentisme. Dix huit textes raffinés et élégants aux accents de dix-neuvième siècle, période si chère à l’auteur par sa littérature et ses thèmes.
Des dandy, des marquises, des vampires et des dieux grecs entremêlent ici leurs destinées, et délivrent leur parfum de temps jadis pour tenter de vous ensorceler et de vous inviter à les suivre à travers les siècles comme si, vous aussi, vous pouviez traverser le temps. Oserez-vous rejoindre l’étrange et onirique cabaret aux couleurs et aux fragrances d’absinthe mis en scène par Estelle Valls de Gomis ?
J’ai découvert Estelle Valls de Gomis il y a maintenant de nombreuses années, alors que Vampirisme.com prenait tout juste son envol. Editrice, auteur, traductrice, illustratrice le côté touche-à-tout du personnage a eu tôt faire d’attirer mon attention, d’autant qu’elle montrait un intérêt certain pour le mythe du vampire (son impressionnante thèse sur le sujet est une des lectures que je dois encore trouver le temps d’entamer). C’est finalement par son rôle de traductrice des premiers chapitre de Varney chez Oxymore que je ferais connaissance avec la plume de l’auteur. Une connaissance complété depuis par son travail d’Anthologiste sur Vampires aux éditions Glyphes, et par le très bon Gentlemen de l’étrange, qui a su parler à l’amateur de la période victorienne que je suis.
Le cabaret vert rassemble donc une petite vingtaine de nouvelles pas forcément récentes mais qui démontre que l’auteur a très tôt montré son intérêt pour au moins deux sujets emblématiques de l’imaginaire : les vampires et la mythologie. Là où elle est très forte, c’est que plusieurs de ses nouvelles marient les deux sujets, mélangeant les genres et les récits. On découvrira ainsi la rencontre entre Bram Stoker et Homère, le tout sur fond de vampirisme. Aphrodite devenant une buveuse de sang immortelle, le descendant d’Ulysse protéger les habitants d’ithaque contre les attaques des morts-vivants… Un mélange aussi surprenant que savoureux.
Objets maudits, quête d’immortalité, de rédemption, l’auteur montre à travers les différentes nouvelles qui composent ce recueil à quel point les auteurs français et anglais de la fin du XIXe siècle ont eu une influence forte sur son imaginaire. Le vampire ne doit être ici envisagé comme une créature mais léthale, qui craint la morsure de la lumière et a besoin de sang humain, frais, pour survivre. Le pieu semble être un moyen radical d’en venir à bout, même si la lumière du jour est également à même de mettre un terme à son existence. On est donc très loin des poncifs actuels, et on se rapproche fortement du vampire d’Anne Rice, et des buveurs de sang de l’époque classique. En des temps ou le vampire était à la fois beau et vénéneux à la fois.
Il serait vain de vanter les qualités de ce recueil, même si certaines accusent malgré tout leur place dans la bibliographie de l’auteur, et sont moins bien aboutis que ses derniers textes. La quasi totalité des nouvelles brillent ici par leur inventivité, le mélange des genres, des époques et des thèmes, et font office de prélude aux ouvrages récents de l’auteur, qui ont su s’émanciper des lourdeurs de jeunesse pour prendre leur envol.
Aaaah, je ne trouvais pas cela normal qu’il n’ait été encore chroniqué 🙂
Je l’ai lu aussi il y a quelques jours, et je crois que tout a été dit : c’est tellement difficile de trouver les bons mots pour vanter ce magnifique recueil ! Elle a une imagination débordante, elle se réapproprie certains mythes/légendes et chaque nouvelle se déguste. C’est vraiment un livre à lire !