Jeune fugueuse, Jessica a été transformée par Léna, maîtresse et bras droit d’Orvano. Ce dernier est un des plus vieux vampires connus, et à ce titre dirige l’un des clans qui structurent la communauté des buveurs de sang. N’ayant pas conscience des desseins de son « maître », Jessica se fait rapidement une place, et finit par déclencher la première phase de ce qui se profile comme une guerre totale avec l’humanité. Mais rapidement, alors que les événements se sont précipités, et que les deux peuples s’opposent avec violence, un troisième camp fait son apparition. Lequel se pose d’emblée comme un danger pour les vampires comme pour les humains. Qui sont ces fous, qui s’attaquent sans discernement aux deux races, et vont les obliger à s’allier ?
Patrice Verry écrit déjà depuis de nombreuses années. Les amateurs de vampires ont ainsi pu croiser son nom au travers de l’anthologie Vampire malgré Lui, pour laquelle il signait le texte «Les dents de Kitty». Une nouvelle très sombre, comparativement à ce que proposait le reste de l’ouvrage. Le fou qui volait la tête en bas est donc un nouvel apport de l’auteur au thème du vampire, et le premier roman de l’auteur à être publié au sein d’une maison d’édition (Voy’el, qu’on apprécie de savoir toujours actif dans les genres de l’imaginaire).
Le fou qui volait la tête en bas est un roman ambitieux à plus d’un titre. L’auteur va imaginer, sur une longue période (le roman débute en l’an mille et se termine en 2042) le devenir des vampires et de l’humanité. Deux races que tout oppose (malgré la prédation de l’une envers l’autre) et que le destin va rapprocher dans leur lutte contre un ennemi commun. Le roman est entrecoupé d’extraits d’un texte mystérieux, Les mémoires de la Mère des Clans, dont on ne comprendra réellement la teneur qu’après la fin du texte, même si certaines connexions avec l’un des personnages principaux finissent par se dessiner.
Au fil des différentes époques qui s’enchaînent dans le récit, le lecteur n’aura pour autant pas forcément le temps de s’attacher avec les protagonistes. Car ceux-ci ne sont pas forcément destinés à rester sur le devant de la scène, Patrice Verry n’hésitant pas à mettre la lumière sur de nouveaux protagonistes, voire à en tuer certains. De fait, on finit par avoir l’impression que les personnages s’effacent devant une histoire plus grande, dont ils sont un maillon. Et la manière dont chaque étape succède à la précédente, voire les renvois aux périodes précédentes, corrobore cette impression. À mon sens, c’est autant un des points forts du roman que son point faible.
Les vampires sont ici présentés comme une race différente des humains. S’ils ont besoin de sang pour survivre, et craignent la lumière du soleil, ils n’ont pas de pouvoirs surnaturels, même s’ils ont une force physique et une rapidité plus grande, et ne craignent pas les symboles religieux. Ils sont néanmoins constitués en clans, même si une fraction d’entre eux vit en indépendant. Et ils ne sont pas immortels : la majorité d’entre eux vit plus longtemps que les humains, mais finissent par mourir, ne serait-ce qu’accidentellement (manque de sang, exposition au soleil…). La terre leur permet enfin de régénérer leur force. Enfin, élément central du texte, l’auteur imagine une maladie qui pourrait être déclenchée par la morsure d’un vampire.
Le fou qui volait la tête en bas est un roman dense, ne serait-ce que pour le nombre d’années sur lesquelles s’étend son récit. Mélangeant les genres (notamment le post-apo, mais pas que), le roman de Patrice Verry est une longue nouvelle qui s’est peu à peu transformée en un texte conséquent, ne manquant ni d’intérêt, ni d’une bonne maîtrise de la narration.