Matthew Richter, ancien policier, détective privé et accessoirement mort-vivant, n’a plus que quelques heures à… non-vivre ? Au milieu de la foule de lykos, vampires, démons, spectres et autres freaks de Nekropolis, il se lance en quête de la Pierre de l’Aube sous les obscurs rayons du soleil noir Umbriel. Du joyeux capharnaüm de l’Éclaboussure aux sombres forêts de Boilestrange où rôdent les métamorphes en chasse, en passant par le domaine arcanique de Féeryl, Tim Waggoner nous entraîne dans le plus improbable des microcosmes: une ville où ne vivent que les sombres créatures de la nuit. Au milieu de ce carnaval de la monstruosité, Matt Richter ne risque-t-il pas de perdre son humanité ? Plutôt crever (encore).
Un pitch original, au moins autant que son personnage central, un univers qui change un peu de l’ordinaire, il n’en fallait pas plus pour attirer mon attention sur ce premier tome de la série Nekropolis, qui marque dès les premières pages son appartenance à une Urban Fantasy foncièrement décalé, sorte de jusqu’au boutisme d’un Dossier Dresden. Le héros, un ancien flic devenu zombie un peu par hasard, mais qui a su conserver son âme et son libre arbitre, a en effet pas mal de point commun avec le sorcier de Jim Butcher. Non dénué d’un certain sens de l’humour, doté d’un cercle de connaissance long comme le bras et prêt à se mettre au service des causes perdues, surtout quand elles sont féminines.
Malgré ces traits de similarité, ce premier tome de Nekropolis tranche radicalement avec l’univers d’Harry Dresden. On est ici propulsé dans un monde parallèle où se sont regroupés la quasi-totalité des créatures monstrueuses connues et inconnues : des vampires aux lycans en passant par les sorciers, les zombies, et d’autres espèces inconnues. C’est donc dans un monde foncièrement non-réel que se déroule l’histoire, un monde où la technologie et la magie s’entremêle, où les ordinateurs et téléphones sont plus organiques que mécaniques, rythmé par le cycle annuel d’une lune nommé Umbriel. Cette ambiance qui tient autant de Blade Runner que d’Existenz ou des cafards du Festin Nu est d’ailleurs le gros point fort du roman, la trame de fond étant assez riche pour crédibiliser les personnages qui y évoluent.
Psychologiquement, le héros n’est pas le seul personnage intéressant de ce premier tome. Si Devona la demi-vampire ne m’a que peu convaincu, tant sa personnalité est effacée par ses années de service auprès de Lord Garm, j’ai adoré des personnages comme Laszlo le chauffeur de taxi, Tête d’os le barman, Waldemar le bibliothécaire où Gregor, qui observe en silence la vie de Nekropolis. Une galerie riche, parfois amusante (Laszlo), parfois inquiétante qui enrichit l’histoire en démultipliant les possibilités offertes.
Les vampires, ici nommés Sanguinés, sont un des clans qui a investit Nekropolis, regroupés sous l’égide de Lord Garm dans un quartier nommé Gothville. On distingue les Sanguinés purs et les demi-sang, mi-humains, mi-vampires. Seuls les sang pur sont immortels, les demi-sang se contentant de viellir très lentement. Les vampires craignent ici le soleil mais son absence de Nekropolis leur permet de multiplier leurs chances de survie. Ils ne dorment pas dans des cercueils mais ont besoin de s’abreuver de sang pour survivre. Pour cela, ils ont le choix entre s’abreuver de sang animal (ou humain, même si cela est officiellement interdit), ou d’opter pour du sang synthétique.
Un premier opus aussi drôle que captivant, qui propulse le lecteur dans un joyeux mélange de film noir, de SF et de fantastique. Une vraie bouffée de fraîcheur (malgré la présence au casting d’un zombie), et un sacré dépaysement au programme !