La Bretonnie, terre des Chevaliers de la Dame, est une nation féodale située à l’ouest du Vieux Monde. La force de ses armées assure paix et prospérité aux frontières occidentales de l’Empire. Durant des siècles, les chevaliers bretonniens ont guerroyé à travers le monde pour préserver leur royaume béni. Mais les hommes-bêtes des forêts profondes et les peaux-vertes du massif d’Orquemont ne sont plus les seules menaces planant au-dessus de leurs fiefs. L’ancien bras droit du Roi Louis, le Duc Rouge, est devenu un vampire avide de sang et de vengeance. Sa damnation le transforma en un adversaire redoutable, et ses légions de revenants faillirent autrefois submerger la Bretonnie. Banni pendant quatre siècles, le voilà libéré par la magie noire d’une sorcière humaine. Le Duc Rouge se dresse de nouveau, et entend bien reprendre sa croisade de sang contre les duchés bretonniens !
Des vampires dans le monde de Warhammer, les lecteurs de cette licence connaissent déjà les fameuses Chroniques von Carstein. La recette a inspiré d’autres récits, comme les aventures des Vampires Geneviève ou Ulrika, menant à différentes lectures du mythe vampirique dans cet univers de jeu de rôles et de figurines. Dernier ouvrage en date, le Duc Rouge se tourne pour sa part vers un profil vampirique plus classique : un ancien champion du Bien, tombé dans la non-mort, revient dévaster son ancien fief pour y créer un domaine mort-vivant. Nous sommes donc en présence d’une intrigue digne du scénario de wargame plutôt que d’aventure rôliste, et uniquement centrée sur cet axe-là. Hélas, le potentiel littéraire de l’ouvrage s’éclipse aussi face à cette chronique d’une campagne de jeu pour Warhammer.
Une fois mis le doigt sur l’handicap majeur de cet ouvrage, intéressons-nous un peu plus à son univers. La trame médiéval-fantastique de Warhammer reste, certes, un patchwork de fantasy difficile à romancer sans tomber dans les clichés du genre. En se basant uniquement sur ce background, Le Duc Rouge ne se développe pas sur des bases suffisamment originales et tourne vite au roman fade, voire même bancal. En témoigne la structure du récit, dense aux premières pages, mais qui s’effiloche progressivement pour s’achever sur un dénouement aussi pauvre qu’abrupt.
Les personnages, proches de la caricature, ne permettent pas de relever le niveau. C. L. Werner tente bien de briser l’image classique et limitée du chevalier médiéval, mais en vain. Il n’a rien d’un roman gothique, genre propice au vampirisme, ni d’un roman chevaleresque, tel que les vers de Chrétien de Troyes nous en ont laissé le souvenir. Bien entendu, mener sa lecture en y recherchant des éléments propres à ces deux genres littéraires serait une perte de temps. Mais leur absence reste tout autant une erreur de l’auteur, qui à défaut de convaincre avec son scénario, ne parvient pas à transcender ses personnages de chevaliers et de vampires. Il en ressort au final un roman fade, surfait et manquant sérieusement de travail d’écriture. Sans parvenir à transcender l’étiquette de littérature de licence, Le Duc Rouge peine donc à convaincre.
Côté vampirisme, inutile non plus d’y rechercher une quelconque originalité. Les vampires sont des créatures surpuissantes, à mi-chemin du zombie et du mage-guerrier, et leurs entrailles ne sont plus qu’une pulpe répugnante. Pire encore, les contradictions s’accumulent : la lumière du soleil a, par exemple, un effet variable au cours du roman. Soit elle indiffère sur nos suceurs de sang, soit elle les affaiblit, et encore selon l’âge du vampire. De même pour la création de nouveaux-nés. D’abord incapable d’engendrer autre chose que des créatures lobotomisées, le Duc Rouge nous révèle quelques pages avant la fin du roman qu’il peut également engendrer de réels vampires en s’inspirant de la méthode prescrite dans la série télévisée Vampire Diaries. Plutôt ridicule, vous en conviendrez. Autant dire que sur cet axe de lecture, la déception est également au rendez-vous.
Le Duc Rouge de C. L. Werner reste donc un ouvrage plutôt dispensable, que même des amateurs vétérans des jeux de licence Warhammer risquent de trouver fade et sans intérêt.