Un étrange donjon vide depuis 500 ans en Transylvanie, des soldats allemands qui s’y installent et réveillent une créature terrifiante, des meurtres sauvages, des einsatzkommandos S.S. qui arrivent en renfort et un spécialiste en folklore local féru d’occultisme chargé de résoudre ce sombre mystère… Le décor de ce récit étonnant est posé… Libre à vous désormais de franchir le pont levis et de pénétrer dans la forteresse noire… si vous l’osez…
Déçu par le film de Michael Mann, F. Paul Wilson a, de son propre aveu (disponible dans les bonus du présent ouvrage), toujours aspiré à proposer à ses lecteurs un pendant visuel de son célèbre roman conforme à l’idée que lui s’en faisait. C’est donc le dessinateur Matt Smith, connu notamment pour avoir travaillé aux côtés de Mike Mignola sur le personnage de Hellboy, qui s’est attelé à la lourde tâche d’adapter en comics le roman original.
Faisant fi du travail du scénariste de Mann, le matériau de base est en effet ici le roman, le récit collant au plus près à l’œuvre initiale. Et force est d’avouer que l’adaptation proposée ici est aussi sombre et pesante que le roman de Wilson, et donne vie à merveille aux différents personnages du récit. Rarement il ne m’avait été donné l’occasion de lire un roman ou finalement n’émerge quasi aucun personnage réellement positif (ce qui amplifiait déjà chez Wilson la noirceur du propos, des personnages et des scènes décrites).
Le comics, a l’instar du roman, commence dans une ambiance typée film de guerre (on est en pleine seconde guerre mondiale) pour dériver peu à peu vers un fantastique nihiliste ou les convictions de la plupart des protagonistes seront mises à mal. Quelques références à la mythologie lovecraftienne (livre d’Eibon, Al Azif et manuscrits pnakotiques notamment) parachèvent ce côté danger venu de par-delà les âges.
Graphiquement, si on excepte une couleur vraiment sommaire (due a priori à des manques de moyen), le trait de Smith est fortement inspiré de celui de Mignola, dont on connaît la qualité à mettre en scène des récits sombres. En bon émule, Smith s’en sort donc à merveille, ses encrages n’ayant rien à envier à ceux du maître. Les visages ont en plus un léger quelque chose qui rappelle parfois le trait d’un Pratt. Les tentatives de couleur à la Sin City (en appuyant notamment le sang à l’aide d’un rouge carmin) ne m’ont cependant pas convaincu outre mesure.
Le vampire ici mis en scène est une créature peu classique dans le genre. Très éloigné des mythes auxquels il semble avoir donné vie, il n’est pas attiré par le sang humain mais semble malgré tout se repaître des crimes qu’il commet parmi la troupe qui séjourne au château. L’abondance de croix présentes dans le donjon semblerait démontrer que le « vampire » craint celle-ci, mais cette peur prendra un tour intéressant dans l’intrigue.
Une adaptation aussi fidèle que graphiquement sympathique, si on excepte une mise en couleur qui aurait gagnée à rester complètement bichromique. Une bonne lecture malgré tout, qui permet de donner une identité graphique respectueuse du roman original.
Le comics est uniquement commandable via l’éditeur Cuult Comics : Acheter the Keep, de Matt Smith et F. Paul Wilson