Sorti en 1977, soit plus de dix ans après son premier film Night of the Living Dead, Martin est le sixième film de George A. Romero. À l’image de son premier long ou de Season of the Witch (1972), le réalisateur s’emploie à démythifier une autre figure emblématique de l’imaginaire, après le zombie et la sorcière : le vampire. Martin se focalise en effet sur le personnage éponyme, qui pourrait — ou pas — être un vampire. En un peu plus d’une centaine de pages, Jez Winship propose une exploration chronologique, technique et thématique du film, investiguant aussi bien le fond que la forme.
Le film de Romero fait partie des œuvres indispensables dans la culture de l’amateur de vampires. Déjà parce qu’il est signé par un réalisateur important pour qui s’intéresse à l’horreur et au fantastique. Ensuite parce que, à l’image de ses métrages précédents, il s’emploie à nouveau à dépoussiérer une figure mythique… et à la faire basculer dans le monde contemporain. L’essai de Jez Winship a beau être court, il n’en passe moins au crible l’ensemble du film, scène après scène. Pour autant, il ne se borne pas à répéter la trame : chaque scène est l’occasion de faire des parallèles avec le reste de la production de George A. Romero, souligner l’importance des lieux, etc. Sans jamais être rébarbatif, l’auteur parvient ainsi, avec une approche chronologique du film, à prendre du recul sur le fond comme la forme, et à analyser les ambitions du réalisateur. Pour ce faire, il se base aussi sur d’autres documents existant, à commencer par la postface de la novélisation du film, ou Romero se livre ses intentions.
Le livre s’intéresse tout particulièrement à la démythification de la figure du vampire. Les rêves et digressions oniriques de Martin interrogent, de même que son rappel au réel. Si le personnage réfute ponctuellement le surnaturel — et donc la possibilité qu’il soit un vampire au sens classique du terme — il n’en éprouve pas moins un besoin de tuer viscéral, et de boire le sang de ses victimes. Le métrage puise dans le pool des films du genre, jouant sur les ombres comme un Nosferatu, montrant son protagoniste le visage barbouillé de sang tel Christopher Lee. Pour autant, les tropes ne cessent en effet d’être infirmés et détournés.
L’essai de Jez Winship est un compagnon idéal pour explorer Martin, sur la forme comme sur le fond. Il permet de recontextualiser le film dans la production du réalisateur, et analyser au fil des scènes les effets provoqués. Indispensable.